Saba, 20 ans, veut combattre la dictature d'Ahmadinejad

Elle aurait aimé s'appeler Saba, comme le vent du nord qui souffle au printemps, célébré par Hafez, le poète libertin cher au c?ur de tous les Iraniens. Elle a 20 ans et, comme toutes les jeunes femmes de 20 ans, se croit mûre comme une femme de 30 ans. Une colère sourde traverse son regard profond relevé par un soupçon de far mauve sur lequel vient sécher une goutte de sang. Elle n'a pas vu arriver la brique lancée par ceux qu'elle appelle les Lebas Sharkhis (les sans-uniformes). Vendredi dernier, son bureau de vote à Ispahan a été pris d'assaut par les électeurs, dès le matin. Lorsqu'elle a voulu voter, l'après-midi, il n'y avait plus de bulletin. « J'ai patienté plus de deux heures, en fin de journée, à la porte d'un autre bureau de vote, avec une centaine d'autres électeurs, mais la police ne nous a pas laissé entrer. »Saba vit dans un grand studio, qu'elle occupe seule, près de l'université. Elle retire son voile. Sa coupe de cheveux, assez courte et très « mode », lui donne un air de petit garçon. Des autoportraits traînent sur la table. Sur certains, elle apparaît le crâne rasé, sur d'autres des mèches rouges tachent sa chevelure couleur d'ébène. « Une dictature est en train de s'installer. Il faut la combattre. Elle ruine notre pays, l'isole totalement. » Elle fume nerveusement cigarette sur cigarette. Ses études de photographie ne la passionnent pas. Elle préférerait émigrer au États-Unis ou au Canada et y étudier la psychologie. « Ça suffit Ahmadinejad et sa politique archaïque. Nous sommes un peuple moderne qui aspire à vivre avec son temps. »un minimum de libertéSaba ne se définit pas comme « activiste », elle appartient à une génération qui, n'ayant rien connu d'autre que la République islamique, revendique un minimum de liberté. Elle aime bronzer sur les plages de Qish, dans le golfe. Elle aime sortir le soir et danser avec ses amis sur les derniers tubes des rappeurs locaux. Elle aime la poésie qui a fait la réputation de la Perse. Pour l'heure, Saba pose sur ses ongles un vernis vert, couleur des partisans de Mousavi, et descend dans la rue retrouver ceux qui, jeunes et moins jeunes, veulent en finir avec la « théocratie fasciste » d'Ahmadinejad, comme il l'appelle.Mario GRANELLI, à Ispah
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