Le Bourget, vitrine de la «techno-guerre»

Le Salon du Bourget se présente comme une véritable vitrine technologique, non seulement du secteur aérien dans son ensemble, mais également du secteur de la défense. Or, si la technologie de pointe est généralement plébiscitée dans le domaine aéronautique ? aller toujours plus vite, plus loin avec une sécurité maximale ?, les discours sont parfois plus nuancés dans le domaine terrestre. Certains n'hésitent pas à parler même d'« hyper-technologie », et de prédire le danger potentiel de technologies « inutiles », caricaturées par le soldat cherchant l'ennemi sur son PDA mais incapable de le voir sur le terrain, ou le général « plasma », fasciné par des écrans d'ordinateur mais coupé de la réalité du terrain.Ce débat, parfois présenté comme celui des « anciens » contre les « modernes », n'a pas lieu d'être. L'utilisation de la plus haute technologie pour le combat moderne est indispensable, et ce quel que soit le milieu : air, mer ou terre. Je dirais même, particulièrement pour l'armée de terre, qui est fortement impliquée dans des opérations extérieures. Dans le cadre des conflits auxquels doivent faire face les forces occidentales aujourd'hui, ne pas recourir à la haute technologie, c'est risquer d'être dépassé. Les ennemis, eux, se sont déjà lancés dans la course à l'équipement.Prenons, par exemple les récents conflits, dits « asymétriques ». Ils se caractérisent par la difficulté à identifier l'« ennemi », souvent fondu dans les populations civiles, et capable de mettre à profit tous types de moyens à sa disposition, y compris, et surtout, non militaires : attentats suicides, combattants armés agissant en milieu urbain et utilisant la foule comme protection, rebelles faisant le coup de feu la nuit et gardant les troupeaux le jour? Dans ces situations, être bien armé ne suffit plus. Il faut être capable d'agir vite et surtout avec discernement ; toute victime civile involontaire ne faisant alors que renforcer le sentiment antioccidental. Il faut être capable de se protéger d'armes, certes « rustiques », mais efficaces comme par exemple le RPG (« rocket-propelled grenade », sorte de bazooka mis au point lors de la Seconde Guerre mondiale), capable de transpercer quelques dizaines de centimètres d'acier et qui se trouve en quantité astronomique dans des pays du Moyen-Orient ou d'Afrique. Sans compter la terrible menace des désormais trop connus IED ou explosifs improvisé, ces systèmes plus ou moins sophistiqués qui consistent à faire exploser des charges au passage de véhicules alliés et qui ont fait plus de 2.500 morts et 23.000 blessés parmi les forces alliées.La réponse à ces enjeux passe principalement par l'utilisation réfléchie, adaptée et, en conséquence, intensive de la technologie. Agir vite avec discernement suppose de disposer en permanence d'informations sur son environnement. C'est l'un des objectifs de ce que l'on appelle la « numérisation du champ de bataille », c'est-à-dire la capacité de fournir à tous les échelons hiérarchiques, depuis le fantassin jusqu'au général, une information qualifiée et pertinente à partir des données récoltées par une multitude de capteurs (drones, satellites, avions d'observation, radars?). Être protégé contre les RPG ou les IED requiert aussi des solutions extrêmement évoluées : en moins de 2 secondes il faut repérer le départ d'une roquette, calculer son point d'impact sur le véhicule et déclencher la contre-mesure appropriée. Et cette contre-mesure ne doit pas créer des dégâts collatéraux.L'efficacité des forces armées se mesure également par leur capacité à se coordonner dans le cadre de missions en coalition, comme celles de l'Otan et de l'ONU. Des soldats français doivent par exemple pouvoir se faire appuyer par des avions américains ou l'artillerie des forces du Royaume-Uni. Tous les moyens d'actions sont mis en commun et optimisés afin d'obtenir le meilleur résultat possible. Derrière cela se profilent des enjeux technologiques majeurs pour les systèmes de communications et d'information, qui assurent la connaissance et la maîtrise de la situation sur un champ de bataille. n Remettre en cause l'utilisation intensive de systèmes de haute technologie, quelles qu'elles soient, est donc un non-sens. Certes, la différence se fera toujours par la capacité à commander des hommes, à comprendre son environnement et à anticiper sur l'ennemi, mais ce sont les hautes technologies et leur utilisation qui feront la différence. La preuve ? Les talibans aujourd'hui utilisent largement les systèmes les plus modernes (téléphones satellitaires, Internet, etc.). Même si les armées occidentales disposent d'une avance technologique réelle, celle-ci s'amenuise très vite? Il ne faudrait pas être dépassé. npoint de vue Pascale Sourisse Directeur général, Thales, systèmes terre et interarmée
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