Haute horlogerie, l'heure est à la crise

Les murs tapissés couleur crème et la moquette épaisse ont beau créé un écrin rassurant, propice aux négociations, c'est bien de la crise dont il est question dans les couloirs du Salon international de la haute horlogerie qui fermera demain ses portes à Genève. Ce salon, organisé par Richemont et ses célèbres marques Cartier, Piaget, Jaeger LeCoultre, IWC, etc., avait jusqu'ici lieu en avril, en même temps que la grande foire de l'horlogerie de Bâle. Il a été avancé pour la première fois au mois de janvier pour prendre une longueur d'avance sur les concurrents. Las.l'attentisme prévautC'est l'attentisme qui prévaut chez les clients distributeurs. Certes, ils sont présents, même s'il y a beaucoup de désistements. Mais ils n'achètent pas. « Nous réduisons nos commandes de moitié et même de 75 % sur certaines marques, car notre stock est très élev頻, explique Jean Lassaussois, un détaillant parisien. « Philippe Houzé, le patron des Galeries Lafayette, vient de confirmer une baisse de 50 % des siennes », chuchote un autre distributeur. Une attitude frileuse qui confirme la tendance observée depuis quelques mois dans l'horlogerie. Les exportations suisses ont plongé de 15 % en novembre. La baisse serait encore plus brutale au mois de décembre. « De l'ordre de 20 % », souffle-t-on.Et si Richemont est fortement touché, avec des ventes en baisse de 7 % sur le troisième trimestre, dont 11 % sur l'horlogerie, tous ses concurrents le sont aussi, de Swatch à Rolex en passant par LVMH. « La chute actuelle de la demande devrait continuer sur le premier semestre 2009 », expliquait récemment le PDG du groupe Swatch Nick Hayek. Conséquence immédiate, Cartier met 160 salariés au chômage partiel. Mais ce ne serait qu'un début à en croire les spécialistes. « Les maisons attendent toutes début février et la tombée des chiffres d'exportations de décembre pour annoncer leurs plans », explique le rédacteur d'une revue spécialisée.Pourtant, la crise ne serait pas une si mauvaise nouvelle. « Comme en finance, il s'était créé une bulle horlogère ces dernières années », analyse la directrice générale du salon, Fabienne Luppo. « Nous allons revenir à des taux de croissance plus raisonnables, de l'ordre de 4 à 5 % au niveau mondial en 2009 », confirme le président de la Fédération de l'industrie horlogère suisse, Jean-Daniel Pasche. Alors que jusqu'ici la croissance du secteur était de l'ordre de 10 à 15 %. Depuis 2003, l'horlogerie était en effet le segment star du luxe. La demande des clients affluait et l'offre des fabricants ne suivait pas toujours. « Nous attendions un an et demi entre la présentation au salon et la livraison, parfois trois ans?! », déplore le distributeur Laurent Picciotto. Avec la baisse de la demande, le marché devrait reprendre sur de meilleures bases.toute la filière impactéeEn attendant, c'est toute la filière, qui va souffrir. Car si le ralentissement touche les grandes maisons, certaines petites entreprises sous-traitantes sont, elles, menacées de faillite. Et la distribution ne sera pas épargnée. « Sur les 3.500 détaillants actifs en France, plus de la moitié devrait fusionner ou disparaître », prédit le rédacteur en chef de Business Montres, Grégory Pons. Pour faire face à la tempête annoncée, les grands groupes vont plus que jamais devoir innover. « Nous allons continuer de monter en gamme et miser sur la créativité pour donner toujours plus de contenu à notre marque », explique le directeur général de Van Cleef and Arpels, Stanislas de Quercize. Les plus optimistes seraient agréablement surpris si les ventes repartaient à la hausse en septembre.
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