La « bad bank » allemande ne convainc pas

défaisanceVoilà six mois que le monde bancaire allemand réclamait une structure de défaisance (« bad bank »). Le 13 mai, le ministre des Finances allemand, Peer Steinbrück, l'a enfin satisfait en présentant un projet qui devrait être opérationnel d'ici à juillet. Et pourtant, l'accueil fait à cette possibilité de placer, pendant une durée maximale de vingt ans, des actifs toxiques dans une société ad hoc n'a pas déclenché l'enthousiasme des milieux bancaires. Certes, on savait que cette première mouture du projet gouvernemental devait être peu attirante pour les Landesbanken. Le projet actuel prévoit en effet le maintien du risque des actifs placés isolés dans le bilan des banques. Or, les Landesbanken en difficulté ont trop de produits de ce type dans leur bilan pour pouvoir en assumer encore la responsabilité. Pour respirer, elles doivent s'en séparer entièrement. C'est pourquoi Berlin prépare un projet alternatif (lire encadré).Mais pour les autres banques ? La Deutsche Bank et les banques mutualistes, toujours réticentes à en appeler à l'État, ont déjà indiqué qu'elles n'avaient pas besoin d'une telle structure. La Postbank, qui était citée parmi les candidates possibles, se contente d'annoncer qu'elle « examine encore en détail » le projet. Enfin, Martin Blessing, le patron de la Commerzbank, qui a hérité de l'immense portefeuille d'actifs toxiques de la Dresdner Bank, a annoncé qu'il ne « voyait pas d'urgence » à monter une « bad bank » pour son groupe.Certaines banques doivent encore être recapitalisées. La banque régionale HSN Nordbank vient ainsi d'annoncer une recapitalisation de ses actionnaires, la ville-État de Hambourg et le Land de Schleswig-Holstein, à hauteur de 3 milliards d'euros.Ce peu d'empressement agace les autorités, en particulier Peer Steinbrück, qui a accusé Martin Blessing, de « prendre des décisions contraires au bien de son entreprise ». Mardi, c'est Jochen Sanio, le patron du gendarme financier allemand, la BaFin, qui a invité les banques à constituer des structures de défaisance, car « la récession n'avait pas encore agi sur les portefeuilles de crédits ».Mais pourquoi les banques hésitent-elles ? D'abord parce que le projet n'offre pas de véritable transfert de risque, mais plutôt un étalement des pertes, tout en coûtant très cher. Les actifs repris à 90 % de leur valeur nominale pourraient dans certains cas conduire à des pertes sèches. Sans compter que la banque devra payer chaque année une contribution qui pourrait peser lourd sur sa rentabilité et sur sa capacité à distribuer des dividendes, donc sur son attractivité pour les investisseurs. Bref, comme le note un analyste, si ces conditions ne sont pas adoucies, la « bad bank » risque de devenir uniquement une solution de dernier recours.
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