Jérôme Kerviel joue son va-tout

Après plusieurs tentatives infructueuses, la défense de Jérôme Kerviel parviendra-t-elle à faire dévier le cours de l'instruction ? C'est ce qu'espère Olivier Metzner, qui a repris fin mars le dossier de l'ancien trader accusé d'avoir fait perdre 4,8 milliards d'euros à la Société Généralecute; Générale en effectuant des opérations « non autorisées et dissimulées », selon la banque. L'instruction est close depuis le 26 janvier, mais la défense disposait de trois mois pour demander des actes complémentaires. L'avocat spécialiste des affaires financières a donc adressé jeudi aux juges Renaud Van Ruymbeke et Françoise Desset une note de 18 pages dont « La Tribune » s'est procuré une copie, afin de leur demander de prolonger leur enquête.La thèse de Maître Metzner est simple : « Sauf à prétendre que toute la hiérarchie de Jérôme Kerviel eut été ?non voyante? », les supérieurs de Jérôme Kerviel « ne pouvaient ne pas voir que s'ils ne voulaient pas regarder ». Il dénonce une « interprétation réductrice, initiée et impulsée par la partie civile, des agissements de Jérôme Kerviel », selon laquelle il aurait détourné les procédures de contrôle et abusé les contrôleurs pour dissimuler ses opérations. Au contraire, soutient le pénaliste, les procédures de contrôle, « très élaborées et très rigoureuses, ont parfaitement fonctionné, mais apparaissent n'avoir donné lieu à aucune réaction de la part de ceux qui en avaient la charge ». Une charge qui s'appuie notamment sur les 74 alertes déclenchées par les opérations du trader, mais dont aucune n'a permis de les percer à jour. « La Société Généralecute; Générale l'a, en parfaite connaissance de cause, laissé librement opérer », conclut Maître Metzner.«?gagner du temps?»À ses yeux, les opérations fictives du trader ne suffisent pas à disculper la banque. Ainsi, sur l'année 2007, « les engagements réels de Jérôme Kerviel se sont élevés à 60 milliards d'euros, lesquels avaient dégagé un gain pour la banque de 1,4 milliard d'euros qui même dissimulé facilement ne pouvait qu'apparaître matériellement dans la trésorerie ». Un solde « totalement visible et connu par les autres traders de la salle », et sur lequel « certains réaliseront des emprunts », « tous matérialisés dans le système Eliot », qui recense toutes les opérations de marché.Interrogée par « La Tribune », la Société Généralecute; Générale ne voit dans cette démarche qu'une tentative de « gagner du temps ». Cette note n'apporte « aucun élément nouveau », estime un porte-parole de la banque, soulignant que des demandes similaires ont été « longuement examinées par les juges » et « leurs arguments rejetés par ordonnances motivées ». Niant de nouveau avoir eu connaissance des opérations de son trader, la banque souligne « les aveux réitérés de Jérôme Kerviel, selon lesquels il a dissimulé à sa hiérarchie comme aux services de contrôle, la réalité de ses positions par des faux, des mensonges et d'innombrables opérations fictives frauduleuses ». Pour son avocat, Jean Veil, l'affaire est entendue : « Jérôme Kerviel est très jeune, son inquiétude face aux risques judiciaires est légitime. Il fait donc tout ce qu'il peut pour retarder les échéances et son rendez-vous avec le tribunal. »De son côté, le parquet indique qu'il va étudier ces demandes. Selon une source interne, « le réquisitoire est en cours de rédaction, il pourrait être terminé avant l'été si tout se passe bien ». Une fois cette pièce envoyée, la défense de Jérôme Kerviel disposera d'un mois pour y répondre. n
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