Le Nord veut faire plier le Sud à Kaesong

Il y a à peine deux ans, les relations entre les deux Corées étaient florissantes. À cette époque, le parc industriel mixte de Kaesong était le symbole d'une coopération économique intercoréenne fructueuse. L'idée fondatrice était simple : un parc industriel, situé en Corée du Nord mais juste à la frontière avec le Sud, capable d'attirer des entreprises sud-coréennes gourmandes en main-d'?uvre (textile, chaussures, montres), en échange des loyers peu élevés, d'aides économiques, de dispositions fiscales avantageuses et, surtout, d'ouvriers nord-coréens bien formés, payés moins de 60 dollars par mois. Lancé en 2004, le projet prévoyait la création de 750.000 emplois et la distribution de 500 millions de dollars de salaires aux ouvriers nord-coréens d'ici à 2012. D'abord tentés par ces conditions très attractives, les investisseurs se sont vite retrouvés pris au piège des aléas de la géopolitique et des rapports en dents de scie entre les deux Corées. Le développement du parc, qui a pris du retard, a abouti à l'implantation d'une centaine d'entreprises, qui emploient 40.000 ouvriers du Nord. En 2008, son activité a atteint 250 millions de dollars. Mais il est menacé de disparition. vexations En février 2008, le retour des conservateurs au pouvoir à Séoul a en effet ravivé les tensions entre les deux Corées. Depuis, la situation n'a cessé de se détériorer. Pyongyang, qui tire pourtant du complexe des revenus non négligeables, multiplie les vexations, les retours en arrière, allant même jusqu'à fermer à plusieurs reprises, pour des motifs souvent douteux, sa frontière aux hommes et aux matières premières du Sud. En mars 2008, l'intégralité des officiels sud-coréens, qui gèrent le parc, ont été expulsés : les propos d'un ministre de Séoul n'avaient pas plu à Pyongyang. En décembre, nouvelle semonce : c'est au tour des travailleurs sud-coréens de rentrer chez eux. Mais le pire revirement est survenu le 15 mai. Le Nord annule unilatéralement tous les contrats concernant les loyers, les salaires et les conditions fiscales. Les entreprises qui ne se plieront pas aux nouvelles règles peuvent plier boutique. Une décision aux antipodes des intérêts économiques de la Corée du Nord : impossible, après un tel geste, de susciter la confiance d'investisseurs étrangers.Aujourd'hui, Séoul continue d'attendre les détails des nouvelles conditions imposées par Pyongyang. Mais, au vu des événements de ces derniers jours, l'avenir de Kaesong semble sévèrement hypothéqué. Thomas Ollivier, à Séoul
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