Le bouclier fiscal est percé

oint de vueLe dispositif mis en place par le législateur, pour limiter l'addition fiscale d'un contribuable à 50 % de ses revenus, recèle des incohérences qui peuvent déconcerter.Notre propos n'est pas de commenter l'opportunité de la mesure ni la dissuasive complexité de sa mise en ?uvre. Nous pensons néanmoins qu'il faut être fait d'un bois bien particulier pour considérer que ne réclamer à un contribuable que la moitié de ses revenus est insuffisant.Il est possible à cet égard de rassurer les opposants au bouclier. Les revenus qui sont pris en compte pour déterminer la barre des 50 % sont retenus dans une très large acception. Les revenus « exonérés » sont, par exemple, pris en compte (sauf petites exceptions) et l'on notera que cela revient à les taxer à 50 %. Il nous paraît bien étrange de taxer les revenus exonérés mais il y a mieux : l'assiette comprend des revenus qui n'ont pas été perçus. On pourrait demeurer incrédule mais? il y a encore mieux : on englobe des revenus qui ne seront jamais perçus.L'émotion suscitée lors de la mise en place du dispositif se cristallisait autour de l'idée que l'on faisait des « cadeaux aux riches ». Pourtant, l'examen attentif des modalités du remboursement permet de vérifier qu'elles rendent possibles la taxation de revenus exonérés et même celle de revenus qui n'en sont pas.Prenons monsieur X qui a souscrit, il y a des années, un contrat d'assurance-vie classique (contrat dit « en francs » à l'époque) pour permettre à ses héritiers de toucher un pécule à sa mort. Le capital de ce contrat augmente chaque année un petit peu en fonction de la pertinence et la générosité de la compagnie d'assurances. Il n'est pas question pour ce père de famille de toucher à cet argent puisqu'il s'agit de prévoyance, il s'agit d'aider ses enfants. Le dispositif du bouclier fiscal prévoit pourtant que la maigre augmentation de son épargne doit être considérée comme un revenu perçu et donc taxée à 50 % !Mieux, les contrats d'assurance-vie classiques peuvent aujourd'hui être transformés en contrats investis sur la Bourse (contrats multisuports). L'épargne de monsieur X pourrait ainsi connaître les joies mais aussi les affres des marchés à risques. Dans une période aussi difficile que la nôtre, monsieur X a pu perdre l'équivalent de la chute du CAC 40 et l'épargne de son contrat peut être inférieure aux sommes qu'il y a versées. Une instruction administrative de 2008* a établi que s'il venait à protéger son capital en le transférant à hauteur de 80 % et plus sur un fonds en euros, les gains enregistrés sur ce support seraient considérés comme des revenus au regard du bouclier fiscal. En d'autres termes, les quelques pour cent glanés sur le fonds euro pour récupérer une petite partie de la baisse subie par son épargne sont mécaniquement ponctionnés à hauteur de la moitié dans le cadre de l'application du bouclier fiscal.Un dispositif fiscal qui taxe la réduction des pertes comme un revenu perçu ne peut définitivement pas être qualifié de « cadeau fait aux riches ». Nous comprenons la volonté administrative de prévenir les astuces en débusquant les faux contrats multisupports qui ne sont en réalité investis qu'en fonds euro, mais l'effort est néfaste lorsqu'il induit des aberrations économiques du type de celles qu'entraînera l'application de cette instruction. n * Instruction du 26 août 2008, BOI 13-A-1-08.
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