Gérer l'impact social de la crise pour en sortir

Crise financière, crise économique et, maintenant, crise du chômage : c'est sur ce dernier pilier d'un château de cartes qui s'écroule, quand l'emploi s'en va, que sont réunis à Rome depuis samedi les ministres du Travail des sept pays les plus riches de la planète, le G7, auxquels s'associent la Russie ainsi que la Chine, l'Inde, le Brésil, le Mexique, l'Afrique du Sud et l'Égypte. Des niveaux de développement disparates et, pourtant, un message commun de la part des syndicats : sur le court terme, la sortie de la crise passe impérativement par la prise en compte de l'impact des destructions d'emplois sur les ménages. Car, au-delà de l'aspect social et du danger de la paupérisation, c'est la consommation, fer de lance de la croissance en temps normal, qui est en jeu avec l'emploi. Sur le long terme, il s'agit de redonner confiance dans le système capitaliste. Or cette confiance ne peut revenir que si une meilleure redistribution de la richesse prend forme. Au filet social pour alléger l'impact du chômage doivent donc s'ajouter de meilleurs transferts sociaux pour alléger les inégalités. « Les ministres du Travail présents ici à Rome semblent maintenant convaincus de ces deux impératifs, précisait hier à « La Tribune » John Evans, l'expert qui fait l'interface entre les syndicats et l'OCDE, mais le problème, c'est qu'ils ne seront pas autour de la table au G20 de Londres. » De fait, le G20, dont on attend aussi bien un engagement fort sur la surveillance des activités financières qu'une volonté réitérée de relancer l'économie mondiale, ne regroupera, jeudi prochain, que les ministres des Finances et les banquiers centraux? Et rien ne dit que le message de Rome sera entendu, d'autant « que les responsables politiques me semblent sous-estimer l'impact de la détérioration du marché de l'emploi sur les composantes les plus vulnérables de la population », remarque Natacha Valla, qui dirige la recherche économique de Goldman Sachs à Paris. Il est pourtant urgent de le prendre en compte : les prévisions de l'OCDE pour l'économie de ses 30 pays membres sont de plus en plus alarmistes. Après avoir tablé en novembre dernier sur une contraction de l'activité de 0,4 % cette année, les nouvelles estimations sont de ? 4,2 %. Quant au chômage, il pourrait atteindre, Japon excepté, un taux de près de 10 % en 2010. De son côté, le Bureau international du travail envisageait, en janvier dernier, que quelque 50 millions d'emplois pourraient être perdus de début 2008 à fin 2009. Et question précarité, la Banque mondiale estime que la crise pourrait avoir pour effet de pousser 46 millions de personnes supplémentaires dans la pauvreté.contraintes budgétairesDes sombres prévisions qui alimentent l'inquiétude des syndicats, également présents à Rome, et qui ont l'intention de manifester le 14 mai à Madrid, le 15 à Bruxelles et le 16 à Berlin et Prague. « Il faudrait un plan supplémentaire, pas forcément impressionnant en taille, compte tenu des contraintes budgétaires, mais ciblé sur la consommation et sur les tranches de population les plus vulnérables », relève Natacha Valla. Baisses d'impôts et de charges pour les ménages en bas de l'échelle, meilleure assurance chômage, gestion plus efficace de la précarité (formation, etc.) : les recettes, dans ce domaine, sont connues. Resterait à les mettre en ?uvre. En fait, c'est déjà en partie le cas, en Europe en particulier. Ainsi, si les plans européens équivalent à 3 % du PIB, contre 2 % outre-Atlantique, c'est aussi parce que les stabilisateurs automatiques comptent pour la moitié des dépenses en Europe. Par stabilisateurs automatiques, on entend l'ajustement des dépenses publiques aux changements de conjoncture. Ainsi, en période de crise, les recettes fiscales des États baissent, tandis que les dépenses sociales s'accroissent, et notamment les allocations chômage. Mais face à la violente dégradation de l'emploi, les systèmes actuels atteignent leurs limites.
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