Jésus et l'âne

Plus escarpé est le chemin qui mène à la victoire, plus gratifiante est la récompense. Mais en vieux routier de la politique transalpine, Romano Prodi sait par avance que sa joie sera de courte durée. Car l'éprouvante bataille électorale contre Silvio Berlusconi n'aura été qu'un avant-goût des difficultés qui l'attendent. La cohésion de sa coalition, qui va du centre gauche catholique aux communistes, va être mise à rude épreuve dès que seront discutées les grandes options économiques du nouveau gouvernement. Le chantier du projet de budget 2007 qui doit être ouvert sans tarder sera l'occasion de mesurer la compatibilité des promesses électorales de Romano Prodi avec les options pas toujours convergentes de ses partenaires de la coalition. Le futur chef du gouvernement italien, qui se souvient avoir été lâché par ses alliés communistes en 1998 sur un différend budgétaire, a pris cette fois la peine de faire avaliser par toutes les formations qui le soutiennent les 280 pages de la plate-forme électorale de la coalition. Mais que vaudra ce volumineux document dans quelques mois ? Le premier défi du futur gouvernement Prodi va être de s'attaquer à la dette publique. Une dette publique qui est la troisième du monde derrière celles des États-Unis et du Japon... mais pour une économie dont la taille n'est en rien comparable ! Les marchés financiers, les agences de notation et les partenaires de l'Italie, tout particulièrement les Européens, guettent avec une curiosité teintée d'appréhension les décisions de Romano Prodi dans ce domaine. Second sujet d'inquiétude : la dérive des déficits publics dont la correction est rendue hypothétique par une croissance quasi atone. Peut-on à la fois soutenir l'activité et mettre l'État au pain sec ? On sait de ce côté-ci des Alpes à quel point l'exercice est difficile. Autre zone d'ombre : où, dans un tel contexte, Romano Prodi trouvera-t-il les milliards d'euros nécessaires à la baisse des charges promise aux entreprises ? Il y a quelques années, Romano Prodi avait choisi comme emblème politique un âne qui rue. Silvio Berlusconi, que la modestie n'étouffait pas, aimait à l'occasion se comparer à Jésus. Dans la crèche italienne aujourd'hui sans doute serait-il souhaitable d'inverser les rôles. Jésus, lui, au moins, sait faire des miracles.
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