Pour réduire les déficits, Bercy mise sur la croissance

Chassez le naturel, il revient au galop. Dans le programme de stabilité que Paris a transmis hier soir à Bruxelles, le gouvernement table sur une croissance de 2,5 % en 2011, 2012 et en 2013. Seule marge de manoeuvre, si la croissance devait se limiter à 2,25 % « seulement », la réduction du déficit public à 3 % du PIB ne serait pas effective en 2013, comme prévu, mais en 2014. Péché d'orgueil ou simple affichage politique destiné à démontrer la capacité de la France à sortir de la crise et assainir ses finances publiques ? Un petit peu des deux à la fois selon les économistes. « Bercy a simplement repris le niveau de la croissance moyenne au cours de la dernière décennie [+ 1,7%], auquel il a ajouté une bonne dose de volontarisme », estime Michel Didier au Coe-Rexecode. Alors que l'industrie donne des signes de redressement comme en témoigne la nouvelle augmentation de l'indice PMI en janvier, ces prévisions sont-elles réalisables ? Le doute est de mise. effort public« On ne voit pas quel pourrait être le moteur à l'origine de cette reprise. Certes, la France, comme la plupart des pays industrialisés, bénéficie désormais avec les pays émergents de débouchés sur lesquels elle ne pouvait compter lors des crises précédentes, mais ce devrait être insuffisant, l'investissement et l'endettement, qui seuls permettent la croissance, ne devant pas être au rendez-vous à court-moyen terme », poursuit Michel Didier. « Cette prévision surestime l'impact et l'effet d'entraînement de l'investissement public engagé dans le cadre du plan de relance. Or, l'histoire prouve que l'effort public a un impact moindre que l'investissement privé. La dépense publique ne rime pas forcément avec croissance », martèle Mathilde Lemoine chez HSBC France, qui soulève la question de la remontée attendue des taux d'intérêt et donc, du coût du crédit. Gilles Moec à la Deutsche Bank n'est pas plus optimiste. « Le gouvernement semble considérer que la crise ne laissera aucune trace profonde. L'Espagne, par exemple, table sur un niveau de croissance à peu près équivalent à celui observé avant la crise, ce qui est déjà une hypothèse très forte. La France estime quant à elle que son économie en ressortira plus forte. Ce volontarisme est d'autant plus frappant que cette performance devra être réalisée dans un contexte d'austérité budgétaire qui pèsera sur la demande intérieure, en particulier sur la consommation des ménages, au moins à court terme. Parce qu'elle sait qu'elle peut compter sur la reprise des exports pour sortir de l'ornière, l'Allemagne pourrait sacrifier sa demande intérieure. La France n'en a pas les moyens, celle-ci étant de loin le principal moteur de notre économie ». Ce n'est pas la première fois que le gouvernement bombe le torse en matière de prévision. En 2008, dans un élan d'optimisme forcené, le gouvernement avait surestimé l'impact sur la croissance des premières mesures économiques qu'il avait mises en place. Le PIB avait augmenté de 0,3 %, loin des 2 %-2,5 % prévus. L'année dernière, il a d'abord sous-estimé l'impact de la crise en tablant sur une croissance de 1 %, avant d'abaisser ses calculs. Échaudé, convaincu qu'il était plus confortable d'annoncer de bonnes nouvelles que d'en craindre de mauvaises, le gouvernement a tout d'abord fait profil bas pour 2010 en fondant son budget sur une prévision de croissance de seulement 0,75 %, portée ensuite à + 1,4 %. nla France bénéficie désormais de débouchés sur lesquels elle ne pouvait compter lors des crises précédentes.  
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