Marin Karmitz  :   « J'ai besoin du regard des autres sur mon propre regard »

On était partis pour une interview d'une vingtaine de minutes. Avant d'être éclaboussée par la passion de Marin Karmitz pour l'image fixe, son envie de transmettre, cette façon si particulière d'en parler, sensible et limpide à la fois. La rencontre a duré une heure et demie. Au fil de la conversation se sont croisées l'histoire de la photo et celle du fondateur de MK2, alors que se dessinait un portrait en creux de ce dernier. L'exposition d'une partie de sa collection de photos s'annonce comme l'un des événements majeurs du festival. Accessible, passionnante, généreuse et subversive. À son image.Quelle relation entretenez-vous avec la photographie??Étudiant à l'Idhec (l'école de cinéma qui a précédé la Fémis) comme opérateur, j'ai commencé par un apprentissage technique de la photo. J'ai ensuite fait des photos pour l'agence de presse Libération. Et puis j'ai arrêté et je ne suis plus revenu au médium pendant des années. Christian Caujolle, le fondateur de l'agence et de la galerie Vu, m'y a ramené à la fin des années 1990. C'est un immense passeur, un homme d'une très grande culture. Jusque-là, j'avais eu une approche de la photo liée à son utilité et à la problématique du témoignage. Lui m'a montré que ça pouvait être un moyen et un lieu de création.Qu'est-ce qui vous a décidé à montrer votre collection en Arles??J'ouvre au public mon jardin secret par urgence de transmission. Mais je veux aussi montrer les passerelles entre les différentes formes que peut prendre la photo. Certains artistes comme Boltanski utilisent la photo comme une palette de peinture. D'autres comme Abbas Kiarostami viennent du cinéma. Enfin, j'ai aussi besoin du regard des autres sur mon propre regard à travers ces oeuvres que j'ai choisies. J'ai acheté chaque image au coup de coeur. Or, ce coup de coeur part d'une histoire. Quand on cumule toutes ces histoires, c'en est une autre qui s'écrit. En exposant ces photos, j'espère comprendre ce qu'elle est.Au sein de votre collection, il y a quatorze photographes que vous suivez de très près...Oui. J'ai constitué de vrais ensembles autour de leur travail pour me rendre compte que cela se faisait à chaque fois autour d'un point précis. Ou alors que l'ensemble s'apparentait au résumé d'une oeuvre. Mes photos de Christer Strömholm donnent des pistes d'accès à tout son travail.Quels sont vos rapports avec ces artistes??Je pars de leurs photos. Et si cela s'y prête, des relations se créent. Parfois, le hasard s'en mêle. Comme cette fois où j'étais entré dans un bar de Boston. Je ne parle pas un mot d'anglais et la seule personne au comptoir était Christian Boltanski?!Propos recueillis par Yasmine Youssi
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