Le stockage des données sur les communications interdit en Allemagne

L'Allemagne va devoir redéfinir sa politique de stockage des données électroniques. Ce mardi, la Cour constitutionnelle de Karlsruhe a, en effet, considéré que la loi en vigueur depuis le 1er janvier 2008 qui oblige les entreprises à conserver et à mettre à disposition de la police et de la justice pendant six mois les données liées aux communications téléphoniques et via Internet était inconstitutionnelle. Certes le contenu des messages et appels n'est pas conservé : seules les données sur la liaison elle-même - heure et date, destinataires, sites Internet visités, etc. - le sont.35.000 plaintes enregistréesMais les juges ont rappelé que l'article 10 de la Loi fondamentale garantit le secret des communications, sauf en cas de protection de l'ordre public ou de menace sur la sécurité. Or, dans sa version actuelle, la loi allemande donne aux autorités un accès aux données dans une « dimension inconnue jusqu'ici dans un État de droit », souligne la Cour. Et de fait, en 2008, les forces de l'ordre ont effectué pas moins de 14.000 consultations des données collectées et stockées. Du coup, pas moins de 35.000 plaintes avaient été déposées à Karlsruhe, ce qui constitue un record.La Cour annule donc cette loi votée au temps de la grande coalition entre la CDU d'Angela Merkel et les sociaux-démocrates dans le cadre d'une directive européenne sur la lutte antiterroriste. Conséquence immédiate : l'ensemble des données conservées actuellement devront être « immédiatement détruites », a précisé le président de la Cour constitutionnelle, Hans-Jürgen Papier. Le gouvernement devra se pencher sur un nouveau texte dans le cadre des conditions très strictes qui ont été définies par Karlsruhe. Si le stockage en tant que tel n'est pas inconstitutionnel, il devra être motivé juridiquement par des soupçons « étayés par des faits », et devra donc rester une exception.Investissements engagésCette décision a été saluée à gauche par les Verts et Die Linke, mais aussi par les Libéraux du FDP, les nouveaux partenaires de coalition d'Angela Merkel. La ministre de la Justice, Sabine Leutheusser-Schnarrenberger, membre du FDP et adversaire acharnée de la loi, a parlé de « jour de joie ». Chargée désormais de préparer une nouvelle réglementation, elle devra compter avec la déception des conservateurs de la CDU qui jugeait la loi utile à la sécurité intérieure. « Nous ne pourrons plus résoudre beaucoup de délits », a ainsi regretté Wolfgang Bosbach, président du comité de l'Intérieur du Bundestag.Du côté des entreprises Internet outre-Rhin, on ne décolère pas. Le Bitkom, la fédération qui regroupe 500 entreprises du secteur, évalue en effet à 300 millions d'euros les investissements réalisés pour permettre le stockage des données ordonnées par la loi qui vient d'être annulée. Et, à présent, le président du Bitkom, August-Wilhelm Scheer, estime que « le coût lié aux nouvelles règles va considérablement augmenter » et « menacer l'existence des petits et moyens opérateurs ». Selon lui, l'objectif gouvernemental de développer l'Internet haut débit serait menacé. Même mauvaise humeur chez les opérateurs télécoms, même si chez Deutsche Telekom, on se refuse officiellement à tout commentaire sur le sujet.Les deux branches, qui estiment que la loi a durablement nui aux relations avec leurs clients, réclament un appui financier de l'État fédéral. Mais la Cour de Karlsruhe a estimé dans son jugement que les charges financières liées à la loi étaient « surmontables » pour les entreprises.
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