Dans le Tennessee,

Contrairement à la plupart des jeunes Américains, Aaron Buchaman, 24 ans, est serein. « C'est formidable d'intégrer une filière épargnée par la récession », dit-il. Comme d'autres étudiants du département nucléaire de l'université de Chattanooga, il va travailler pour la Tennessee Valley Authority (TVA), un producteur d'électricité qui fournit 9 millions de clients dans six États du Sud. La promotion 2010 comprendra aussi de moins jeunes diplômés, tel Stetson Boyd, 48 ans, contraint de quitter la filière nucléaire au début des années 1980 et « prêt à participer à sa renaissance ».« Nous sommes le dernier électricien à avoir mis une centrale en service dans ce pays et nous serons le prochain à recommencer », assure Bill McCollum, le directeur opérationnel de la TVA. Son réacteur de Watts Bar 1, dans l'est du Tennessee, a été achevé en 1996. Watts Bar 2, lui, entrera en fonction en 2012. La TVA compte activer une autre centrale, celle de Bellefonte, dans l'Alabama, commencée en 1974, presque achevée en 1988, mais qui n'a jamais démarré. Après l'accident de Three Mile Island en 1979, le Congrès avait gelé la construction de nouvelles centrales. Et « les perspectives de demande en électricité étaient réduites », se rappelle Dan Pratt, chargé de réhabiliter le site.28 licences en attenteLe contexte a depuis changé aux États-Unis où 19 % de l'électricité est produite à partir du nucléaire, avec 104 réacteurs gérés par 40 électriciens. Barack Obama veut intégrer le nucléaire « à la diversité énergétique » du pays dont les besoins en électricité devraient bondir de 45 % d'ici à 2030.Reste que 28 nouveaux réacteurs attendent, parfois depuis des années, une licence que la Commission de régulation du nucléaire (NRC) accorde au compte-gouttes. Le département de l'Énergie va garantir 18,5 milliards de dollars d'emprunts qui financeront quatre réacteurs, mais la filière réclame 100 milliards de dollars.« L'opinion publique a pourtant compris l'importance du nucléaire pour réduire les émissions de CO2 », juge Ron Littlefield, le maire de Chattanooga, où se trouve le siège de la TVA, celui de la division services du groupe nucléaire Westinghouse (filiale de Toshiba), et la future usine de turbines à vapeur du français Alstom Power. « Une extension industrielle comme celle d'Alstom apporte des emplois biens payés. » « Pour chaque dollar investi dans une centrale, 1 dollar supplémentaire est injecté dans l'économie régionale », ajoute Dan Pratt.8 précommandes d'EPRLe site de Bellefonte a déjà coûté 4,6 milliards de dollars à la TVA. Pour le rendre opérationnel, le groupe envisage de bâtir une structure qui accueillerait l'AP1000, le futur réacteur de Westinghouse, ou d'achever les deux réacteurs à eau pressurisée avec l'aide d'Areva, spécialiste de cette technologie, et de turbines Alstom. « Nous trancherons en 2010 mais le deuxième scénario paraît plus économique », avoue Dan Pratt. Dans ce cas, la TVA espère qu'une licence au printemps pour une mise en ligne des réacteurs en 2017. Voilà deux semaines, la NRC a exigé de Westinghouse des modifications techniques sur son AP1000. Mais « nous tablons toujours sur une certification en 2011 et une première mise en ligne en 2016 », assure Bruce Phares, directeur des services des réacteurs à eau bouillante (BWR) de Westinghouse à Chattanooga. Pour le groupe, l'enjeu est énorme : sur les 28 réacteurs précommandés aux États-Unis, 14 sont des AP1000. De son côté, Areva a obtenu 8 précommandes d'EPR aux États-Unis, dont il attend la certification en 2011, mais il vise un tiers des projets du pays. Du fait de la crise et de l'octroi limité de garanties fédérales, « la renaissance du nucléaire sera décalée de quelques années », a récemment tempéré Jack Fuller, directeur général de GE Hitachi Nuclear Energy, dont le réacteur de troisième génération (ESBWR) ne figure pas dans les quatre projets susceptibles de bénéficier des garanties. Fuller attend toutefois sa certification pour fin 2010. Éric Chalmet, envoyé spécial à Chattanoog
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