Les assureurs annoncent le pire, en cas de liberté de résiliation des contrats

On savait les assureurs opposés à la possibilité de résilier un contrat à tout moment, prévue par le projet de loi sur la consommation défendu par Benoît Hamon. N\'ayant pas été entendus par le gouvernement, ils prennent l\'opinon publique à témoin. Avec un argument massue: si le gouvernement croit que cette nouvelle possibilité va accroître la concurrence et donc faire baisser les prix, il se trompe lourdement. C\'est ce qu\'ont fait valoir ce mardi Bernard Spitz, président de la Fédération française des sociétés d\'assurance (FFSA), et Gérard Andreck, président du Gema (mutualistes), lors d\'une conférence de presse, ce mardi.Plus de concurrence, pour une baisse des prix...Pour Benoit Hamon, c\'est évident: nous pensons que davantage de possibilités pour les consommateurs de changer de compagnie d\'assurance amènera à ce que les prix baissent. On a rarement vu que davantage de concurrence fasse augmenter les prix\", avait déclaré le ministre. C\'est totalement faux, affirment les assureurs.... ou pour une hausse?En effet, à l\'heure actuelle, les prix sont lissés en tenant compte du fait que les risques de sinistre (inondations, cambriolages...) ne sont pas uniformes tout au long de l\'année. En faisant payer pour une année pleine, ils peuvent donc compenser des périodes plus chères par d\'autres qui le sont moins. \"La résiliation à tout moment est une fausse bonne idée qui n\'aura aucun effet positif sur les tarifs, d\'autant que les tarifs d\'assurance auto et habitation en France sont déjà les plus bas des grands pays européens\", estime Gérard Andreck. Au contraire, face à une pratique probable de \"désassurance\" lors des périodes présentant moins de risques (ainsi, de nombreux motards résilieraient leurs contrats à l\'automne, utilisant moins leur deux roues l\'hiver, qui correspond du coup à une période moins risquée), les assureurs voudront... assurer leurs marges en relevant leurs tarifs. \"En cassant l\'annualité du contrat on supprime l\'effet de la mutualisation des risques dans le temps\" souligne un document FFSA-Gema.Bernard Spitz s\'appuie également sur une étude commandée par la FFSA au professeur Frédéric Jenny, président du comité de la concurrence de l\'OCDE, dont les conclusions vont dans le sens de la profession. Selon cette étude, les assureurs n\'auront d\'autres choix que d\'augmenter les prix \"pour tenir compte de l\'incertitude relative au comportement des assurés\" ou de renoncer au principe de la tacite reconduction. ,\"Dans les deux cas la mesure envisagée sera moins favorable aux intérêts des consommateurs que la situation actuelle\", ajoute-t-il dans une lettre au président de la FFSA.Comparaisons internationalesLa FFSA et le Gema ont établi des comparaisons internationales, avec les pays -peu nombreux- pratiquant la résiliation à tout moment. En Grande-Bretagne, c\'est le cas depuis longtemps. Or, quand la prime moyenne d\'une assurance auto atteint 391 euros en France, elle est de... 447 euros Outre Manche. En outre, les marges des assureurs français sont plutôt faibles, en regard de celles des pays où se pratique la résiliation à tout moment (Grande-Bretagne, Pays Bas, Norvège, Canada) , selon une étude réalisée par Accenture. Autant dire que les possibilités de baisse de prix ne sont pas nombreuses.La fin des rabaisLe secrétaire général du Groupement des entreprises mutuelles d\'assurance (Gema), l\'autre grande fédération du secteur, Jean-Luc de Boissieu, est lui aussi circonspect face aux arguments du gouvernement. \"Il est bien évident qu\'avec ce changement de système, les assureurs ne feront plus de rabais la première année car ils s\'exposent à un risque de résiliation le premier jour de la deuxième année\", a-t-il expliqué à l\'AFP.Avant même sa présentation en Conseil des ministres, l\'assouplissement de la résiliation des contrats d\'assurance avait déjà connu quelques difficultés. Le Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF), organe dépendant du ministère de l\'Economie chargé de donner un avis sur les projets de loi en matière d\'assurance notamment, avait ainsi donné un avis négatif à cette mesure Le CCLRF est notamment composé de parlementaires, de représentants des banques, des assureurs et des consommateurs.Que Choisir plutôt pour la résiliation à tout momentDu côté des associations de consommateurs, Alain Bazot, président de l\'UFC-Que choisir, a dit sa \"satisfaction\" face à la mesure du gouvernement, estimant que cela allait \"dynamiser la concurrence\". \"Cela suppose qu\'on fasse très attention au risque de quitter une assurance avec une bonne couverture pour une assurance qui serait moins chère avec des prestations moindres\", a-t-il relevé.Battant en brèche l\'argument du prix, un assureur n\'ayant pas souhaité être identifié a invité le gouvernement à plutôt baisser la fiscalité sur les contrats \"pour faire diminuer les tarifs et redonner du pouvoir d\'achat aux ménages\". Par exemple, pour 100 euros versés pour un contrat d\'assurance automobile au tiers, les taxes représentent un peu plus de 34 euros, a-t-il indiqué.
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