Pour un nouveau contrat fiscal

Parce qu\'elle n\'est plus en phase avec le monde économique réel, la fiscalité est de moins en moins rentable pour les puissances publiques. L\'absence de croissance de certains pays occidentaux et l\'inflation de leurs dépenses publiques sont évidemment les causes des déficits publics, mais pas les seules. Et les tensions sociales autour de l\'impôt atteignent des niveaux inquiétants. Nous nous réfugions dans la recherche de boucs émissaires : entreprises internationales, particuliers suffisamment aisés pour payer l\'impôt... Au point d\'aboutir à un message absurde : si nous manquons d\'impôt c\'est de la faute de ceux qui le payent !Parce que les entreprises ont un terrain de jeu qui s\'est considérablement élargi, leurs stratégies reposent sur des marchés internationaux. Et on s\'interroge : comment appréhender des acteurs économiques dont l\'essentiel de la richesse est créé hors de leur Etat d\'origine ? Où payer l\'impôt ? Qui en bénéficie ?Optimiser pour survivre²Dans un écosystème fiscal noyé de règles en France comme ailleurs, dont certaines font primer l\'objet politique et sociétal sur l\'efficience budgétaire, l\'obligation d\'optimiser s\'est imposée aux entreprises mais aussi aux particuliers. Loin de détourner les règles, l\'optimisation fiscale sous toutes ses formes s\'attache avant tout à ne pas subir la guerre que se livrent les Etats pour capter les recettes. Il ne s\'agit pas de ne pas payer son impôt mais bien de payer sa juste part d\'impôt dans chaque Etat. La fiscalité a dû dépasser les sphères techniques pour prendre une place considérable dans la stratégie globale des entreprises tant elle est devenue un avantage ou un handicap concurrentiel. Des Etats régulièrement en situation de failliteContrairement à une opinion couramment répandue, les Etats sont régulièrement en situation de faillite. A chaque fois, la désuétude de la politique fiscale au regard de l\'économie qu\'elle est censée taxer représente l\'une des causes profondes de ces défauts souverains. Tous les pays occidentaux, les anciens pays développés, font face à cette situation. Mais ils y répondent de manière diverse. Les Etats-Unis, dont la Californie et l\'Illinois, ont presque suspendu leurs paiements en 2011, font primer la modernisation de leur économie et la conquête de parts de marché dans les régions émergentes. La seule idée qui fasse consensus actuellement aux Etats-Unis est que la fiscalité ne doit pas nuire à la compétitivité. De l\'impôt sanction à l\'impôt productifPlus que de la justice, c\'est la rentabilité de l\'impôt qui est doit être au cœur de la refonte du contrat fiscal. Plus qu\'être imposé, l\'impôt doit être consenti et sécurisé. Plus que l\'expression d\'une souveraineté nationale, l\'impôt doit intégrer la réalité des échanges économiques et commerciaux mondiaux et régionaux. La fiscalité peut être un outil de compétitivité, la fiscalité peut-être un outil de croissance, la fiscalité peut être lisible, mais pour cela, elle doit être repensée. Le monde a changé, la fiscalité conçue pour un monde fermé doit être réinventée.La France et une partie des pays européens se situent à l\'opposé de la logique de compétitivité partagée par de nombreux Etats, tels que les Etats-Unis mais aussi la Chine ou l\'Inde. Notre débat fiscal ne porte pas sur l\'adaptation de l\'impôt au monde du XXIème siècle mais plutôt sur la façon de protéger la fiscalité des mutations historiques. Comment conserver une fiscalité nationale unique dans un marché intégré avec une devise commune ? Ce complexe du château-fort tend inévitablement à une logique répressive afin de prélever plus sur une base réduite, logique qui aboutit à la contraction du nombre des opérateurs présents sur le sol national et à leur rentabilité. Les recettes publiques baissent encore alimentant une nouvelle vague de répression jusqu\'au point de non-retour.Un New deal fiscal international est-il envisageable ? Dans ce contexte, le momentum politique, social et économique est arrivé pour conclure un nouveau contrat fiscal en France, en prenant en compte le monde qui nous entoure. Rappelons nous qu\'au début du XXème siècle, un premier équilibre, fortement empreint des puissances économiques d\'alors avait été trouvé, avec la création du droit fiscal international, au bénéfice des « Etats colonisateurs ». Or, la mondialisation des échanges et l\'émergence de nouvelles puissances économiques a bouleversé ce statu quo, a redistribué les cartes de la fiscalité, lançant une nouvelle ère, celle de la géopolitique fiscale où chaque Etat s\'attache à être attractif pour améliorer sa base imposable (des taux d\'impôt sur les sociétés bas comme en Irlande, des régimes spécifiques tels que le crédit impôt recherche en France, une absence de fiscalité sur les profits s\'ils sont réinvestis à l\'étranger aux USA). Nous vivons aujourd\'hui dans un monde sans règle fiscale internationale efficace qui transforme tout investissement international en une prise de risque majeur particulièrement préjudiciable pour les entreprises françaises.Les grands rendez-vous internationaux tels que le G8 en juin où la fiscalité des multinationales tiendra une place de choix dans les discussions, le plan d\'action globale de l\'OCDE attendu en juillet pour donner une dimension multilatérale à la fiscalité internationale ou les récentes velléités de la Commission européenne de se saisir de la transparence fiscale des entreprises seront l\'occasion de partager des points de vue, des analyses de situation... mais ils seront surtout l\'occasion de s\'assurer que le New deal fiscal international espéré assurera la pérennité des recettes fiscales. Il ne faudrait pas pour capter l\'impôt des multinationales du numérique, perdre les recettes fiscales apportées par les champions français à l\'international.        
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.