Le sucre européen a perdu le nord

Les acheteurs de sucre européen ont intérêt à être patients. S'ils peuvent attendre jusqu'au mois d'août, la tonne de sucre leur coûtera 661 dollars. Pour une livraison en mai, il leur faudra débourser 52 dollars de plus, soit 713 dollars. Un décalage qui atteste d'un manque de sucre en Europe, alors même que le Vieux Continent était encore, il y a quelques années, premier exportateur de sucre blanc. Sur le papier, l'Europe reste le premier producteur de betteraves à sucre, avec une production autosuffisante à 85 %. Mais l'année 2010 a été celle des dérèglements. Sur les 13,3 millions de tonnes de sucre attendues, seules 11,5 millions de tonnes ont été produites, après de fortes pluies qui ont rendu le ramassage des betteraves laborieux. Dans le même temps, la production de la Russie s'est aussi effondrée, plutôt à cause de la sécheresse estivale que des pluies d'automne. Sur le marché physique, les conséquences de ces problèmes météo ont été radicaux.La tonne de sucre s'est traitée jusqu'à 900 dollars, notamment au Portugal, où une véritable pénurie s'est manifestée jusque sur les étals des supermarchés en janvier dernier. En pratique, les 27 se retrouvent aujourd'hui dépendants du marché international, à attendre que la récolte des gros producteurs se fasse et que les raffineurs mettent leur production de sucre blanc sur le marché. La Commission Européenne a d'ailleurs relevé de toute urgence le quota de sucre exempté de taxes à l'importation le 10 mars dernier. Ce qui permet en théorie aux acheteurs de mettre la main sur 300.000 tonnes de sucre sans taxe. Une fois munis de leurs quotas, les acheteurs doivent encore trouver la marchandise, ce qui ne s'avère pas si simple. Car les pays les moins avancés ainsi que les pays de la zone ACP (Afrique Caraïbes Pacifique), qui avaient jusqu'alors un accès préférentiel au marché européen, lui ont préféré des débouchés plus proches comme la Chine ou le Moyen-Orient cette année. « Le déficit du marché européen n'a pas été comblé par les importations comme prévu, et du coup la situation de l'Europe est fragile », constate Peter de Klerk, expert chez Czarnikow.À court terme, le manque de sucre raffiné s'explique paradoxalement par une récolte très abondante en Thaïlande. Le second producteur mondial derrière le Brésil a vu sa production grimper de 12 % À 7,57 millions de tonnes cette année. Selon la société de conseil Czarnikow, cette surproduction retarde les différentes étapes du traitement des cannes à sucre et décale les livraisons de sucre blanc. À moyen terme, la raréfaction du sucre en Europe risque de se confirmer, même avec la détente des prix attendue cet été sur le marché international, avec la récolte brésilienne. Car les stocks européens devraient atteindre, en septembre prochain, un plancher historique, soit 500.000 tonnes à fin septembre selon Sucden.
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