Difficile pour l'Europe agricole d'exister face au Brésil et à l'Ukraine

« L'industrie manufacturière chinoise, les ingénieurs informatiques indiens et les poids lourds de l'agri-business brésilien redéfinissent les termes de la compétitivité mondiale », relevait en septembre 2006 le commissaire européen au commerce de l'époque, Peter Mandelson. Des tendances qui n'ont fait que s'accentuer ces dernières années. Face aux nouveaux poids lourds agricoles - Brésil en tête, mais aussi Ukraine et bientôt Russie, l'agriculture européenne ne cesse de perdre des parts de marchés, y compris dans des pays qui lui étaient auparavant acquis, tels que le Maroc ou l'Égypte. Désormais, pains et galettes y sont fabriqués à partir de blé ukrainien ou argentin. « Avec ou sans subventions, la production agricole est rentable en Ukraine », remarque ainsi Jean-Jacques Hervé, spécialiste de l'agriculture et conseiller d'Index-Bank (une filiale du Crédit Agricolegricole) à Kiev. Même chose au Brésil ou en Argentine : les terres y sont abondantes et peu chères, de même que la main d'oeuvre, avec pour résultat un steak qui coûte deux fois moins cher à produire là-bas que dans la riche Europe. Mieux, il existe des réserves de terres très fertiles mais encore inexploitées au Brésil, en Ukraine ou en Russie, de même que des réserves de productivité, puisque les rendements y sont encore faibles, comparés aux niveaux européens. Dans ces conditions, comment la production agricole européenne tirera-t-elle son épingle du jeu de la mondialisation à l'avenir ? Pour certains, la question est plutôt : « Le pourra-t-elle ? ». « Les exploitations familiales, typiques de l'Europe, vont se faire laminer, prédit Jean-Louis Rastoin, professeur à Supagro Montpelliero, et les délocalisations s'accentuer ». « A moins que les exploitations agricoles se regroupent », envisage Jean-Jacques Hervé. Ainsi, quatre exploitations de quelques centaines d'hectares - déjà une belle ferme en Europe - atteindraient, en s'associant, la taille critique - ou presque, face à l'agri-business étranger. « Ce système permettrait une rotation commune des cultures et une mise en commun des charges fixes », précise ce spécialiste, à défaut de sauvegarder l'agriculture familiale...stylos et sacs recyclables Quant aux délocalisations, déjà le fait de géants de l'agro-alimentaire tels Lactalis ou Danone, qui ont pris pied dans les nouvelles puissances agricoles, elles permettront en tout cas à l'agri-business européen d'être présent dans les nouvelles zones de production... Mais l'Europe doit surtout privilégier la chimie verte, grâce à ses avantages technologiques, et produire, entre autres, stylos et sacs recyclables à base de maïs. Reste à savoir si la pensée politique européenne, et en particulier française, sur la PAC, a réellement intégré la nouvelle donne mondiale... Lysiane J. Baudu
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