L'industrie américaine des hedge funds tente de se renouveler

S'il est trop tôt pour mesurer les conséquences de la réforme du secteur financier aux États-Unis adoptée en juillet dernier, dite loi Dodd-Frank, nombreux professionnels estiment qu'elle pourrait redessiner les contours de l'industrie des hedge funds américains. Une des dispositions phares du texte, appelée règle Volcker, prévoit l'abandon par les banques d'investissement de leurs activités pour compte propre souvent comparées aux hedge funds. Goldman Sachs est d'ailleurs fréquemment considérée comme le plus gros hedge fund du monde. Mais les banques peuvent se rassurer car la « Volcker rule » ne s'appliquera pas avant plusieurs années. Et elles pourront continuer, selon le texte, à investir directement dans des fonds alternatifs jusqu'à hauteur de 3 % maximum de leurs fonds propres. En revanche, la prise de participation dans ce type de sociétés n'est pas interdite.C'est d'ailleurs l'option retenue par certaines banques en réponse à cette future règle. Ainsi, Credit Suisse et JP Morgan, déjà présente, dans la gestion alternative, ont respectivement pris 30 % de York Capital (14 milliards de dollars d'encours) pour 425 millions de dollars et 55 % de Gavea (6 milliards de dollars d'encours). Et pour pérenniser leur activité, d'autres hedge funds pourraient être tentés d'ouvrir leur capital aux banques.Si pour des raisons de conjoncture les grandes banques ont déjà réduit leurs activités pour compte propre, d'autres déclarent avoir agi par anticipation à la future loi (Goldman Sachs et JP Morgan l'ont fait). Par conséquent, si une partie des équipes dédiées occupera d'autres postes, toutes ne seront pas redéployées. Certains traders quittent donc leur banque pour créer leur propre hedge fund parfois financé par leur ancien employeur, comme l'a fait par exemple Goldman Sachs.« S'il y a énormément de projets de création de hedge funds en ce moment, tous n'arriveront pas à lever les capitaux nécessaires pour démarrer car les investisseurs sont actuellement beaucoup plus sélectifs. Il faut ainsi que ces fonds prévoient d'emblée des investissements en hommes et en infrastructures conséquents », déclare Laurent Dupeyron, président d'Olympia Capital Management. Un gérant seul aura donc du mal à se lancer. « Une équipe de 15 à 20 personnes, dont certaines ayant des fonctions support adéquates (déontologie, back-office...), et des capitaux sous gestion au départ de 300 millions d'euros semblent être les minima requis pour un lancement réussi », précise Laurent Dupeyron. D'où la présence croissante des fonds d'investissement dans cette industrie (lire « La Tribune » du 26 octobre). Ainsi, KKR a recruté 9 traders de Goldman Sachs pour développer, entre autres, son activité de hedge funds. De son côté, Blackstone prévoit d'investir à travers son fonds Strategic Alliance Fund II 1,5 milliard de dollars dans 10 à 15 nouveaux hedge funds en apportant du « seed money » (capital d'amorçage). Il a déjà commencé en mettant 150 millions de dollars dans un produit créé par George Taylor, un ancien trader de Credit Suisse spécialisé dans les matières premières. Avec la crise, la concurrence entre fonds d'amorçage est moins forte, estime Blackstone qui parle de « marché d'acheteurs ».Quel que soit le modèle de développement, le succès n'est ainsi pas garanti. Pour preuve, l'ancien trader de Goldman Sachs, Shafiq Karmali, vient de fermer son fonds Cypress Lane Asia faute de performance et de collecte. Depuis le début de l'année, la collecte nette pour l'ensemble de l'industrie s'élève à 40 milliards de dollars, indique TrimTabs. Sachant que les fonds les plus importants, gérant au moins 5 milliards de dollars, captent 80 % de ces flux, la place est réduite pour les nouveaux entrants. Par ailleurs, les fonds gagnent en moyenne 3,5 % depuis le début de l'année. Beaucoup de hedge funds ne pourront pas se verser de commissions de performance d'autant que 52 % de l'industrie est toujours loin de son « high water mark » (meilleure valorisation atteinte).Malgré tout, en France, ces évolutions intéressent les fonds de hedge funds à la recherche de nouvelles opportunités d'investissement. Ainsi, New Alpha a investi en juin dans G Capital Management, un hedge fund créé par des anciens de Goldman Sachs. « Nous avons investi dans G Capital Management spécialisé dans la stratégie global macro discrétionnaire qui est selon nous ,particulièrement adaptée au contexte actuel. L'expérience de l'équipe et ses performances ont été des critères déterminants. Par le biais de l'incubation, nous les accompagnons dans leur développement en particulier en Europe », précise Antoine Rolland, directeur général de New Alpha. Olympia Capital Management analyse actuellement plusieurs produits en phase de lancement. Reste à persuader les investisseurs hexagonaux encore très réticents vis-à-vis de ces produits.
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