Les actionnaires minoritaires d'Altergaz repartent en guerre contre l'ENI

La guerre monte d'un cran entre les actionnaires minoritaires d'Altergaz, premier distributeur alternatif de gaz en France, et le géant pétrolier italien ENI, qui détient désormais 63 % de la société et 70 % des droits de vote. À quelques jours de l'assemblée générale qui doit se tenir le 20 avril, les minoritaires mettent en cause l'exactitude des comptes 2010 qui se soldent par une perte nette de 32 millions d'euros contre un bénéfice de 4 millions en 2009. « Le niveau de résultat ne nous semble pas représentatif de l'activité et des conditions de marché en 2010 », affirme Nicolas Walewski, directeur associé de Alken Asset Management, qui possède 11 % d'Altergaz. « On est bien obligés de se demander pourquoi, après avoir passé l'année à publier des communiqués expliquant que tout va bien, Altergaz a finalement clôturé ses comptes par une perte conséquente », déclare Colette Neuville, présidente de l'association de défense des actionnaires Adam, consultée par les minoritaires qui ont formé le concert Consellior. Outre Alken, Consellior regroupe l'investisseur Allan Green et Ofi Asset Management. Il détient 34,9 % du capital mais 27,98 % des droits de vote, soit un niveau inférieur à la minorité de blocage. « On peut se demander si Altergaz n'a pas fait apparaître cette perte afin de justifier une augmentation de capital qui permettrait à l'ENI de se débarrasser des minoritaires en les diluant », ajoute Colette Neuville. Interrogée, la direction d'Altergaz précise que « les actionnaires recevront les réponses appropriées lors de l'assemblée générale ».Ce doute sur les comptes rejoint les interrogations des minoritaires sur le contrat d'approvisionnement en gaz qui lie Altergaz à son actionnaire majoritaire. En entrant au capital en 2007, la major italienne, principal vendeur européen de gaz, y a vu un débouché pour ses surplus de gaz, celui-ci étant réservé sur le très long terme, sans flexibilité, auprès des producteurs comme Gazprom ou la Sonatrach. Jusqu'à présent, Altergaz arbitrait en permanence entre ce contrat ENI et le marché de gros, pour profiter des meilleurs prix. Depuis deux ans, les prix « spot » sont très en dessous des prix long terme.Demande d'expertise« La perte 2011 laisse à penser que l'ENI vend trop de gaz trop cher à Altergaz, qui semble moins libre pour optimiser ses approvisionnements », souligne Nicolas Walewski. « On est dans un cas typique de conflit d'intérêt potentiel », insiste Colette Neuville. Difficile à établir puisque le contrat liant ENI et Altergaz n'est pas public. Les minoritaires ont demandé, l'an dernier, une expertise, refusée par l'ENI et par le tribunal en référé. Un appel est en cours.La bataille entre l'ENI et les minoritaires d'Altergaz ne date pas d'hier. Pour mieux protéger leurs droits, ces derniers demandent, de longue date, le transfert d'Altergaz, une des plus grosses capitalisations du Marché libre, sur un compartiment plus réglementé. Cela aurait obligé l'ENI à lancer une OPA pour s'assurer le contrôle de la société. La major italienne a racheté les parts des fondateurs en décembre, puis ceux d'Apasa, une petite association de minoritaires, à un prix tenu secret. Les actionnaires réunis dans Consellior ne seraient pas opposés à une telle issue. Mais à bon prix. Ils estiment la valeur d'Altergaz à environ 500 millions d'euros alors qu'elle ne vaut que 300 millions en Bourse.
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