Les Chalhoub, premiers émissaires du luxe au Moyen-Orient

Anthony Chalhoub a ouvert la première franchise Hermès au Koweït il y a quinze ans. Et le co-PDG du groupe Chalhoub voudrait bien reprendre cette pépite, tombée dans l'escarcelle de son concurrent qatari, Al Mana. Lui qui gère déjà toutes les marques de LVMH au Moyen-Orient imagine la force de frappe d'un tel rapprochement. « Quel patron de centre commercial pourrait résister face à un groupe qui apporte vingt marques, dont Louis Vuitton et Hermès ! » s'exclame-t-il. Et Anthony Chalhoub s'y connaît en matière de pression sur les gérants de Mall, ces temples du shopping oriental.Le groupe, qu'il codirige avec son frère Patrick, est le leader du luxe au Moyen-Orient, dont il détient environ un tiers du marché. Sous forme de franchise, de joint-venture ou de distributeur, il représente plus de 280 marques via 350 points de vente, de l'Arabie Saoudite au Qatar, du Koweït au Yémen. Si les femmes en abaya noire exhibent fièrement leurs sacs Vuitton, leurs lunettes Chanel ou leurs chaussures Louboutin, c'est grâce à eux. Ou plutôt à leur père, Michel Chalhoub, qui apporta dans les années 1960 les premiers couverts Christofle et vases Baccarat aux Bédouins enrichis par le pétrole. Ballottée par les guerres entre la Syrie, le Liban, puis le Koweït, la société familiale s'est installée depuis 1992 dans une zone franche de Dubai. Elle y prospère depuis pour atteindre plus de 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires, en croissance attendue de plus de 15 % cette année.Pourtant la crise, qui a frappé la région en 2009, a aussi fait reculer leurs ventes (? 1 %) pour la première fois. De quoi réfléchir ! « Nous passons d'une phase d'expansion à une stratégie de consolidation », résume Anthony Chalhoub. Le patron investit 30 millions d'euros dans un logiciel pour optimiser ses stocks, ses commandes et son marketing sur l'ensemble de ses pays et marques. « Jusqu'à présent, chaque pays avait son propre système et nous ne pouvions rien consolider », explique David Vercruysse, en charge du nouvel outil. Le groupe se recentre sur les consommateurs locaux, moins volatils que les touristes. Il a aussi fermé une dizaine de boutiques non rentables et mis fin à quelques contrats dont Paul & Jo et Tartine et Chocolat. Enfin, à l'heure où toutes les marques de luxe s'attachent à fidéliser leurs clients, les Chalhoub doublent le budget de formation des directeurs de leurs magasins pour les empêcher de partir au plus offrant. « Nous voulons désormais être leader dans chaque pays et chaque catégorie de produit », souligne Patrick Chalhoub.Or, le groupe fait face à une double menace. Celle des petits concurrents, qui, comme Aïshti au Liban, se développent fortement sur leur marché local. Et celle des marques de luxe, qui, à l'instar de L'Oréalcute;al, cherchent de plus en plus à prendre leur indépendance afin d'avoir un meilleur contrôle sur leur politique de prix et d'assortiment. Pour leur donner envie de rester sous leur protection, les Chalhoub multiplient les accords de joint-venture (Dior parfums, Sephora, Coty, Puig...) et partent à la conquête de nouvelles zones de croissance. Au menu, l'Arabie Saoudite, l'Égypte et même l'Iran. « Pour le moment, il y a encore quelques embargos à respecter, mais rien ne dure jamais dans la région », sourit Anthony Chalhoub.
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