Président fondateur du cabinet Caac, conseil et acquisition ...

Quel regard portez-vous sur la Fiac??On y va comme on irait au Mondial de l'automobile. Si le grand public s'intéresse à l'art contemporain, le contraire n'est pas encore vrai. Les galeristes restent trop dans leur tour d'ivoire. Il manque des explications auprès des ?uvres pour expliquer la démarche des artistes. D'autant que c'est très compliqué aujourd'hui de la décrypter. Il n'y a plus de courants ou de groupements collectifs comme à la fin du XIXe ou au début du XXe siècle, quand les artistes se réunissaient pour travailler dans une même veine. Maintenant, chaque ?uvre est singulière, ce qui impose à chacun un effort de compréhension. Il y a aussi à la Fiac quelque chose de l'ordre du classicisme. Il ne s'agit pas de partir dans des extravagances, mais de prendre des risques, notamment avec des installations dans lesquelles certains artistes pourraient mieux s'exprimer. Le fabuleux espace du Grand Palais pourrait être aussi plus valorisé, notamment pour exposer des ?uvres monumentales. Le profil des collectionneurs a-t-il évolué??Avant la crise, on a vu des cadres de 30-40 ans, venus de la finance, s'intéresser à autre chose que le placement dans l'immobilier. Dans les pays émergents, de jeunes collectionneurs cherchent aussi par ce biais à montrer leur présence en enchérissant sur les marchés. Une manière de dire à la vieille Europe « maintenant il va falloir compter avec nous ». L'intérêt croissant des particuliers pour l'art contemporain dénote aussi d'une évolution. Leur objectif n'est pas de montrer leurs ?uvres à tout le monde. Mais plutôt d'asseoir leur statut au sein de leur propre réseau. C'est une sorte de passeport culturel qui permet de dire « voyez mon niveau de connaissance ». Un nouveau type de collectionneur est donc en train de naître?: celui qui souhaite une ?uvre d'art, au même titre qu'un accessoire de mode ou une belle voiture. Les collectionneurs qui recherchent une pièce particulière pour donner un sens à leur démarche se font en revanche plus rares. Mais eux s'intéressent vraiment aux artistes et moins à la cote de l'?uvre en elle-même. Il y a donc aujourd'hui tout un travail d'accompagnement à fournir, commenter les travaux et conseiller sur les ouvrages de référence. Quant aux entreprises, si certaines disent que leur enveloppe budgétaire a fondu, d'autres, à l'inverse, en profitent pour se positionner autrement sur le marché face à leurs concurrents et parler différemment à leurs clients. Quels conseils donneriez-vous aux visiteurs de la Fiac cette année??De devenir pauvre, au sens où l'indique Rainer Maria Rilke dans « Lettres à un jeune poète ». C'est-à-dire perdre ses repères habituels pour se laisser surprendre, prendre le temps de regarder. L'art est d'intimité publique, il s'adresse à soi. Mais attention à ne pas se fier seulement à ses émotions. L'?uvre n'est pas juste un rapport à soi. Elle est aussi un rapport au monde. On a toujours tendance à traduire ce que l'on voit par ce qui se passe en nous. Or, l'art est un vecteur de connaissance. La seule émotion est ridicule. Elle doit s'accompagner d'une réflexion, car l'?uvre d'art est en elle-même une question. Si on s'intéresse à l'idée ou au concept qu'elle soulève, alors on pénètre dans une autre dimension. C'est là où l'abstraction est intéressante, car elle nous permet de nous extraire de l'illusion ou de l'image du monde. Il faut toujours partir de l'?uvre et non de soi.Propos recueillis par Sophie Péters« La singularité des ?uvres impose à chacun un effort de compréhension »
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.