Réserve parlementaire : certains élus ont peur de la perdre

La transparence souhaitée par le gouvernement touchera les parlementaires. Tel est le souhait de François Hollande. Cette transparence sonnera-t-elle le glas de la réserve parlementaire, comme le veut la rumeur ? Sans réelle surprise, un certain nombre de députés et de sénateurs, notamment dans l\'opposition, sont vent debout et affutent leurs arguments de défense.C\'est notamment le cas de Xavier Bertrand, le député de la deuxième circonscription de l\'Aisne. « C\'est totalement transparent : tout conseil municipal doit prendre une délibération publique pour indiquer cette part de réserve parlementaire. La réserve parlementaire, ça n\'a rien de secret. C\'est une enveloppe dont les députés disposent pour financer des projets. [...]. Vous savez ce qui va se passer si on la supprime ? Comme ça, le pouvoir socialiste aura la possibilité, régions, départements et députés aussi, de dire : \'vous êtes obligés de passer par nous pour obtenir des subventions\', a-t-il expliqué mardi sur l\'antenne d\'Europe 1.Une marge de manœuvre de plus en plus faibleHervé Novelli est sur la même longueur d\'ondes. « Cette réserve est très utile. Elle permet de solidifier le lien entre les parlementaires et son territoire car elle leur permet de soutenir des projets locaux », explique l\'ancien député de la 4e circonscription d\'Indre-et-Loire, aujourd\'hui retiré des débats parlementaires. Dans la majorité également, les avis divergent. Laurence Rossignol, la sénatrice socialiste de l\'Oise admet également l\'utilité de cette réserve. \"Elle permet réellement de venir en aide aux territoires\". « Toutefois, il faut bien admettre que cette marge de manœuvre est de plus en plus faible depuis que cette réserve est distribuée de façon égalitaire à l\'Assemblée. Autrefois, elle permettait de \'récompenser\' tout particulièrement les députés les plus méritants et les plus actifs dans les travaux et les débats. Aujourd\'hui, distribuée égalitairement, elle ne donne plus la possibilité de financer des projets locaux importants », regrette l\'ancien ministre des PME du gouvernement Fillon.Dès son arrivée au perchoir, en juin 2012, Claude Bartolone, le président de l\'Assemblée nationale avait décidé d\'attribuer des enveloppes au montant identique à tous les députés, soit 130.000 euros. Jusqu\'à la réforme appliquée pour la première fois en 2013, le montant alloué par parlementaire pouvait varier dans un rapport de 1 à 10.Près de 160 millions accordés aux deux chambres du Parlement Les responsables de groupe ont droit au double et le président de l\'Assemblée se voit accorder 520.000 euros et d\'environ deux millions d\'euros pour des œuvres caritatives. L\'usage qui en est fait doit être publié à la fin de l\'année parlementaire. Au total, ces enveloppes représentent un coût de 90 millions pour l\'Assemblée national. Au Sénat, le montant de ces réserves s\'élève à 58 millions.Le montant des subventions versées au titre de la réserve parlementaire est soumis aux règles communes à toutes subventions de l\'État. Ainsi, il ne peut dépasser 50 % du volume des travaux prévus, hors taxe. Si elles peuvent compléter d\'autres subventions accordées par les collectivités territoriales, l\'ensemble ne doit pas dépasser 80 % des travaux. Par ailleurs, tout est sous contrôle. Les présidents de groupe, puis le ministère de l\'Intérieur et enfin Bercy valident et autorisent l\'usage de ces sommes. « Ce système est totalement transparent », martèle Jean Arthuis, le sénateur centriste de la Mayenne. Laurence Rossignol est bien plus nuancée. \"Au Sénat, tous les sénateurs devraient obtenir une réserve d\'un même montant puisque les cagnottes spécifiques autrefois attribuées au président, au président de la commission des finances et au rapporteur du Budget ont été supprimées. Or, certains sénateurs obtiennent encore des montants très largement supérieurs à ceux de leurs collègues. C\'est anormal\", explique-t-elle, plaidant pour que cette réserve ne soit pas supprimée mais qu\'elle soit remplacée par un Fonds parlementaire pour l\'aide aux territoires. \"Il faut de la transparence totale, au Sénat comme ailleurs. Si on continue avec ce culte du secret, on prend le risque de voir cette réserve supprimée. Ce sont les territoires qui seront les grands perdants\", poursuit Laurence Rossignol.Crise des vocationsCette course effrénée à la transparence peut-elle faire des ravages dans le monde politique. « Avec cette nouvelle contrainte, qui s\'ajoute à la règle envisagée de non cumul des mandats, on risque de déclencher une crise des vocations au niveau local. Si le gouvernement s\'entête, il prend le risque de transformer le Parlement en une assemblée de fonctionnaires soumis aux règles des appareils, totalement coupés de leurs racines locales », estime Hervé Novelli.Tous les parlementaires sont-ils du même avis ? Bien sûr que non. Si la majorité soutient - parfois du bout des lèvres - le projet présidentiel, certains membres de l\'opposition adoptent une attitude modérée. Favorable à la récente standardisation des montants des réserves parlementaires, Michel Piron, le député UMP de la 4ème circonscription de Maine-et-Loire avoue que cette « cagnotte » lui permet essentiellement de dépanner les plus petites communes lorsqu\'il y a une urgence financière. « Mais le rôle et l\'influence du parlementaire ne se résume pas à l\'usage de cette réserve. Il est le lien, l\'interface entre les territoires et l\'administration, le préfet de région. Si elle devait disparaître, ce ne serait pas dramatique », admet-il. « Toutes les économies sont bonnes à prendre. Je constate toutefois que la suppression de la réserve parlementaire, si elle était actée et votée, serait la seule mesure permettant de réduire la dépense publique », ironise Jean Arthuis. Autrement dit, sur ce point, le plus dur reste à faire... 
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