La finance islamique peine à trouver ses marques en France

laceLa finance islamique, un concept plus facile à énoncer qu'à mettre en pratique ? Sans doute, car Bercy a beau se montrer enthousiaste ? selon le ministère de l'Économie, la première obligation conforme à la loi islamique (sukuk) devrait être émise en France en 2010 ?, celle-ci peine à s'installer dans l'Hexagone. La censure, le 14 octobre dernier par le Conseil constitutionnel d'une disposition législative visant à aménager le régime de la fiducie afin de faciliter l'émission de sukuk ? l'article de loi en question n'a toutefois pas été censuré sur le fond mais au motif qu'il n'avait pas de lien avec la proposition de loi dans laquelle il s'insérait ?, a certes contribué à ce retard. Mais le problème est plus large.« Aujourd'hui, les banques françaises n'ont à proprement parler pas besoin de la fiducie pour émettre des sukuk, elles pourraient très bien le faire par le biais de structure de titrisation », souligne Anouar Hassoune, responsable de la coordination internationale pour la finance islamique chez Moody's. Alors que les émissions de sukuk reprennent dans le monde ? au cours des dix premiers mois de 2009, le volume d'émission de sukuk a été 40 % supérieur à celui des dix premiers mois de 2008 ?, les banques françaises se heurtent à de nombreuses contraintes. « Une vaste majorité de leurs actifs sous-jacents ne sont pas ?charia? [loi islamique Ndlr] compatibles » ; elles n'ont pas forcément de management suffisamment familier des techniques de finance islamique. Ou bien, elles n'y ont tout simplement pas intérêt pour des questions d'image, de coût ou de logique commerciale. » Plusieurs grandes banques de réseau, un temps engagées sur ce nouveau créneau, auraient, ces derniers mois, choisi ? comme la Société Généralecute; Générale ? de réduire la voilure.Les réticences sont encore plus flagrantes dans le domaine de la banque de détail. « Si se lancer dans la finance islamique peut faire sens du point de vue d'une clientèle islamique, ce n'est pas forcément le cas du point de vue de la clientèle traditionnelle », note un autre expert. « Certains clients pourraient voir dans cette initiative une façon de faire du prosélytisme. » Certaines banques craignent ainsi pour leur image.signes d'impatienceElles ne sont pas non plus forcément prêtes à épauler les banques islamiques étrangères en quête d'implantation dans l'Hexagone, même si celles-ci sont de petite taille. « Il faut évidemment prendre en considération l'aspect concurrence », estime Anthony O'Sullivan, à l'OCDE. D'autant que, comme l'explique Anouar Hassoune, « les banques qui veulent s'installer en France vont vouloir servir toutes les classes de clientèles : collectivités locales, PME et particuliers ».Résultat : du côté des banques islamiques, certains signes d'impatience se font sentir. « Depuis 2007, la place de Paris a fait de gros efforts pour développer cette finance », reconnaît Jean-Marc Riegel, directeur général de la Qatar Islamic Bank. Mais « il y a eu des retards à l'allumage », déplore-t-il. D'autres, comme lui, regrettent que la banque de détail ne soit pas une priorité dans le développement de cette finance. « Sur les cinq axes de développement énoncés par Paris Europlace, nous nous étonnons de ne pas voir cité celui de la banque de détail », remarque Lilian Le Falher, président de la Kuwait Finance House (Barheïn).En attendant, le marché de la finance islamique, estimé à 800 milliards de dollars (actifs détenus par les institutions financières islamiques), progresse d'environ 15 % par an et la France n'a toujours pas sa part du gâteau.
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