Ils savent tout mais ils ne diront rien

Cuisinier à l'Élysée depuis dix-huit ans, il a servi trois présidents et une bonne partie du gotha de la diplomatie internationale. Maurice Alexis a connu l'époque fastueuse, celle des repas qui durent des heures et des voyages à l'étranger. À l'époque, le chef de l'État se déplaçait avec sa brigade de cuisiniers. Afrique, Tunisie, Espagne : des voyages aux quatre coins du monde qui lui laissent des tas de souvenirs. « À Tel-Aviv, je n'avais pas le droit d'utiliser les cuisines de notre hôtel parce que nos produits n'étaient pas casher, raconte-t-il. J'ai préparé le repas pour M. Mitterrand et ses 12 invités sur une cuisine improvisée dans ma chambre d'hôtel ! » Une autre fois, il s'est retrouvé nez à nez avec Madame Clinton dans les toilettes d'un hôtel de Corrèze où il préparait un déjeuner pour elle et Madame Chirac : « Ce n'était pas très protocolaire ! » sourit-il. Depuis quelques années, l'Élysée a perdu de son faste. Depuis Chirac, les cuisiniers ne se déplacent plus avec le chef de l'État et les restrictions budgétaires se sont durcies avec l'arrivée de Sarkozy. Suppression des dépenses inutiles et transparence : les grands thèmes du sarkozysme n'épargnent pas l'Élysée. Le fromage disparaît de la carte et chaque fournisseur est sélectionné sur appel d'offres. « On doit montrer patte blanche : on trie les déchets, on utilise du papier recyclé, on ne cuisine pas le thon, explique Maurice Alexis. Il faut faire avec. » Malgré les efforts, le dernier rapport de la Cour des comptes publié le 15 juillet épingle la gestion des cuisines de l'Élysée, jugeant excessifs les 6,7 millions d'euros consacrés à la restauration du Palais pour 2009. La brigade de Bernard Vaussion, chef cuisinier de l'Élysée depuis quatre ans, compte onze cuisiniers. Chaque président a ses habitudes, et ils ont dû s'y habituer. « Avec M. Sarkozy, il faut faire vite, prévient Maurice Alexis. Pour gagner du temps, on sert l'entrée et le dessert directement dans l'assiette. » Depuis l'arrivée du président, les repas officiels ne durent pas plus de quarante-cinq minutes : « Il gère l'Élysée comme un chef d'entreprise », remarque le cuisinier. Les petites attentions culinaires de Maurice Alexis et de ses collègues restent derrière les fourneaux : le protocole veut qu'ils n'aient aucun contact avec le président. L'Élysée offre d'autres récompenses : « J'ai cuisiné pour la reine d'Angleterre, Fidel Castro, Lady Di, énumère fièrement le cuisinier. J'ai vu Kadhafi installer ses tentes dans les jardins de l'Hôtel Marigny. Ce sont de beaux souvenirs. » Avec ses casseroles et ses poêles, l'impression de participer, de loin et dans l'ombre, à des moments historiques. Aglaé de ChalusDemain : Médecin de ministre
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