Les romanciers nourrissent leurs ?uvres de leurs voyages et pérégrinations à travers le monde. Dans la lignée des grands écrivains-voyageurs que furent Jack London, Bruce Chatwin ou Nicolas Bouvier, la France assure la relève de ce genre littéraire très exigeant. Après Sylvain Tesson et ses fascinantes errances dans les steppes d'Asie, il faut désormais compter avec David Fauquemberg, qui a toutes les qualités pour devenir un grand « travel writer » : un regard acéré sur les pays traversés, une féroce envie de sortir des sentiers battus associée à un style sec et nerveux servi par une langue précise et des dialogues percutants.Son deuxième ouvrage, « Mal tiempo », est une plongée en apnée dans l'univers de la boxe cubaine. Sur ce thème où de nombreux romanciers se sont cassé les dents, il parvient à nous fasciner par sa description hyperréaliste d'une séance d'entraînement dans un gymnase surchauffé ou son évocation d'un combat officiel. Le narrateur est un boxeur parisien sur le retour chargé par son coach de préparer la venue à Cuba d'une équipe française pour un stage intensif. Car si l'île des Antilles est connue pour ses cigares et son dictateur immuable, elle est aussi réputée pour abriter un formidable vivier de champions de haut niveau en athlétisme et en boxe.Réalité sordideLe récit est basé sur la rencontre du narrateur avec un jeune boxeur au talent prometteur : « J'ai traversé la salle, aimanté par l'intensité de ses frappes, leur sécheresse inouïe pour un type aussi corpulent. Le piston des épaules dégageait une telle puissance qu'on percevait sur l'impulsion le frôlement sourd de ses muscles. » À travers le portrait de ce prodige du ring et le récit de son éphémère carrière, l'auteur décrit la découverte de la réalité sordide d'une île livrée à la misère et à la débrouille.Entre roman et récit de voyage, David Fauquemberg brouille les cartes avec jubilation. Un texte aussi attachant et dérangeant que son précédent ouvrage, « Nullarbor », une virée hallucinée en Australie fort justement récompensé par le prix Nicolas-Bouvier en 2007 (paru chez Hoëbeke, il vient d'être réédité en poche chez Folio).Laurent Pericone« Mal tiempo », de David Fauquemberg. Fayard, 284 pages, 18,90 euros. livre

latribune.fr

22 Sept 2009, 18:20

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