Procès Apple/Samsung : et si l'imitation soutenait l'innovation ?

Et si finalement l'issue du procès Apple contre Samsung qui entre dans sa dernière ligne droite aux Etats-Unis n'avait aucune importance ? « Qu'est-ce que ça peut faire si Samsung a copié Apple ? (who cares if Samsung copied Apple) » s'interroge de manière un brin provocatrice James Allworth sur le blog de la Harvard Business Review. Ce chercheur au sein du Forum pour la croissance et l'innovation de la prestigieuse université américaine, qui a travaillé chez Apple et Booz & Company selon sa biographie, va même plus loin en demandant : « ne nous en sortirions-nous tous pas mieux si nous laissions et même encouragions les entreprises à se copier entre elles ? » De quoi se faire retourner dans sa tombe le pauvre Steve Jobs qui était prêt à déclencher « une guerre thermonucléaire » contre Android, le système d'exploitation mobile de Google qu'il accusait d'avoir pillé son iPhone.« L'éloge des copieurs » James Allworth revient sur un précédent procès retentissant intenté par Apple en 1994 contre Microsoft, accusé d'avoir copié l'esthétique de l'interface graphique du Macintosh dans Windows 2.0 et 3.0. Procès qu'Apple a perdu. Or la firme à la pomme, qui argumentait qu'il lui serait impossible d'innover si on laissait ses concurrents le copier, « n'a pas du tout cessé d'innover. Au contraire : ils ont sorti l'iMac. Puis OS X. Et ensuite l'iPod. Et l'iPhone. Puis plus récemment l'iPad. [...] Apple n'a pas pu se reposer sur ses lauriers ; pour retrouver la rentabilité, ils ont dû innover aussi vite que possible » relève Allworth. Il rejoint le propos d'un livre décapant qui sort le mois prochain aux Etats-Unis « L'économie de la contrefaçon : comment l'imitation suscite l'innovation », de Kal Raustiala et Christopher Sprigman, dont un extrait a été publié il y a peu dans le Wall Street Journal sous le titre « l'éloge des copieurs. » Les auteurs, des professeurs de droit, s'intéressent à des secteurs qui se protègent moins contre la copie que la high tech comme la cuisine, la publicité, ou même le football américain professionnel. Et de conclure que, certes, « l'imitation peut causer du mal et il faut quelques règles pour protéger la création mais les grandes innovations se créent souvent sur d'autres existantes, ce qui exige le droit de copier. »Le cas de l'iPad mini D'ailleurs, James Allworth relève qu'un des dirigeants d'Apple, Eddy Cue, a suggéré de concevoir un iPad plus petit (le fameux iPad mini de 7 pouces qui fait l'objet de nombreuses rumeurs), après avoir aimé utiliser la Galaxy Tab de Samsung, comme il l'a lui-même écrit dans un email à Tim Cook, révélé au cours du procès. « Si Apple finit par gagner le procès contre Samsung et l'empêche de sortir de nouveaux téléphones et tablettes ou lui facturent de lourds frais de licences, qui croira que le marché va devenir soudainement plus innovant ou que les produits vont devenir plus abordables ? » interroge le chercheur, qui juge, in fine, ces procès contre-productifs. « Laissons ces sociétés en découdre uniquement sur le marché, là où les consommateurs, et non les tribunaux, prennent les décisions sur l'innovation. Dans un tel monde, la meilleure défense contre la contrefaçon n'est pas d'attaquer en justice mais d'innover à un rythme tel que la concurrence ne puisse pas copier assez vite. »  
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