Les ambitions de Google dans le livre face à la justice

À14 heures cet après-midi, dans la salle d'audience de la troisième chambre du tribunal de grande instance de Paris, deux univers vont s'affronter. D'un côté, le champion mondial d'Internet et du numérique, Google, de l'autre, les représentants de l'économie livresque de la culture française sur papier, à savoir le groupe La Martinière (Le Seuil, La Martinière, L'Olivier, etc.), le syndicat professionnel des éditeurs (SNE) et la Société des gens de lettres (SGDL). Derrière ce contraste se joue une étape dans la définition des règles applicables à la numérisation des livres pour Internet.Lancée en juin 2006 par Hervé de La Martinière, le PDG du groupe La Martinière, la plainte estime que la numérisation de livres opérée par Google Livres, sans autorisation préalable des éditeurs ni des auteurs, constitue une violation du droit de reproduction, du droit d'auteur, une contrefaçon de marques et, enfin, du parasitage. Les trois années de procédures n'ont pas permis de calmer les esprits, au contraire. « Le constat d'huissier auquel nous avons procédé, en octobre 2008, a relevé dans la base numérisée de Google près de 12.000 références d'?uvres sous droit de la seule maison d'édition Le Seuil », explique Yann Colin, l'avocat du groupe La Martinière. « Le même relevé effectué, sans huissier, en ce début de semaine en dénombre 16.000 », dénonce-t-il.« Nous estimons actuellement à plus de 100.000 le nombre d'?uvres françaises, toujours sous droit, à avoir été numérisées par Google », précise Christine de Mazières, déléguée générale du SNE. Dans ses accords passés avec les grandes bibliothèques américaines, le moteur de recherche a rapporté dans ses filets ces ouvrages, le plus souvent épuisés chez l'éditeur ou orphelins, mais qui ne sont toujours pas tombés dans le domaine public et qui restent donc soumis au droit d'auteur. Le procès, initialement programmé l'an dernier, était attendu par toute la profession. La Martinière comme le SNE, qui ont régulièrement eu des rencontres avec Google, ont systématiquement rejeté les offres de transactions du groupe américain.trois argumentsNi Google ni Alexandra Néré, son avocate dans ce dossier, n'ont souhaité répondre à nos questions. Mais d'après nos informations, la défense devrait reposer sur trois arguments essentiels : le juge français n'est pas compétent pour ce sujet qui relève du droit américain ; la numérisation n'est pas une reproduction ; la mise à disposition gratuite en ligne de seuls extraits des livres relève de « l'exception de courte citation » qui existe en droit français.Ce procès, dont le jugement devrait être mis ce soir en délibéré pour n'être rendu que dans un ou deux mois, va régler le passé. Mais ne va pas dire comment éditeurs et moteur de recherche devront organiser l'avenir. « Cette partie de bras de fer se déroule en ce moment aux États-Unis, et nous y prenons part », se félicite Christine de Mazières. De fait, Google et les éditeurs américains sont en train d'amender, sous l'?il du département de la Justice, l'accord qu'ils avaient conclu. Le juge new-yorkais saisi du dossier devrait probablement reporter au-delà du 7 octobre sa décision sur la validité de l'accord. D'autant que la Commission europénne, le ministère français de la Culture, le SNE et son homologue allemand, notamment, ont eu le droit de faire valoir leurs positions. La justice américaine, comme les instances européennes, voudraient éviter de créer les conditions de l'apparition d'un monopole du livre numérique. n La plainte estime que la numérisation de livres constitue une violation du droit de reproduction, du droit d'auteur, une contrefaçon et, enfin, du parasitage.
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