La finance islamique reste bridée par une faible diversification

Plus résistantes que les autres banques pendant la crise financière, les institutions financières islamiques affichent de prometteuses perspectives mais font face à d'importants défis. Dans un rapport, le cabinet conseil McKinsey révèle qu'à travers le monde, la croissance des actifs bancaires islamiques a décéléré pour s'inscrire à 15 % en 2009 contre 27 % en 2008. Mais dans les pays clefs pour son expansion, « le secteur a vu ses parts de marché croître de manière plus significative que ceux de l'industrie bancaire dans son ensemble ». Les principaux pays concernés par cette croissance sont ceux du Golfe persique. Au Koweït, les actifs de la finance islamique ont bondi de 23 % entre 2003 et 2009 pour représenter 30,8 % de ceux de l'ensemble des banques du pays, la proportion la plus élevée au monde. Le Koweït est suivi par le Qatar (22,7 % du total des actifs) et la Malaisie (19,6 %), alors que le secteur se développe à vive allure en Asie, notamment en Indonésie.Selon Moody's, il a fallu 40 ans pour que les actifs des institutions islamiques atteignent le niveau actuel de 1.000 milliards de dollars. L'agence de notation estime que cinq années seront nécessaires pour doubler ce volume et évalue le potentiel du secteur à « au moins 5.000 milliards de dollars ». Aller sur de nouveaux secteursMcKinsey note toutefois que pour prospérer, ces banques, dont les activités sont bridées par l'interdiction de l'intérêt, devront rationaliser leurs coûts et s'inspirer des autres banques en accélérant la dépréciation de leurs actifs non performants. « Un gisement de 15 milliards de dollars de bénéfices supplémentaires se trouve à leur portée », rien qu'en améliorant leur gestion interne, juge Amer Afiouni, directeur associé de McKinsey à Dubaï. « Afin de capter des profits additionnels », le consultant recommande à ces établissements de pénétrer des territoires où ils sont peu présents : gestion de fortune, banque d'affaires et autres marchés émergents. En attendant de telles diversifications, la rentabilité des banques islamiques a décliné dans leurs principaux marchés en 2009 : un recul de 89 % au Koweït, de 73,3 % en Indonésie, de 50 % dans les Emirats... Au Moyen-Orient, les directeurs de banques craignent pour la solidité du secteur. Un sondage Deloitte indique que 55 % d'entre eux estiment que les banques islamiques sont sous-capitalisées. Ces mêmes responsables jugent nécessaires une réforme de la comptabilité et de la gestion du risque, divergeant d'un pays à l'autre et dépendant des juristes spécialistes de la Charia. Les émissions d'obligations islamiques, les sukuks, ont chuté de 16 % à 11,8 milliards de dollars depuis le début 2010. Mais Citigroup estime que la demande regagnera les niveaux ayant précédé les crises ? celle des « subprime » et Dubaï ? « au troisième trimestre de 2011 ». L'agence Bloomberg a d'ailleurs recensé une trentaine de projets d'émission de sukuks par des pays (Pakistan, Indonésie..) et des entreprises (Saudi Arabian Oil, VTB Bank...). Dans les activités de détail, les projets abondent : Albaraka, la première banque islamique de Bahreïn, vise une acquisition en Indonésie, la Malaisie a émis quatre nouvelles licences d'assurance islamique, le Britannique HSBC va développer des services spécialisés en Inde et en Chine... Et en Afrique du Nord, « existe un véritable engouement, les produits s'y développent même si les premières banques islamiques s'y sont implantées voilà dix ans à peine », note Mehdi Haroun, avocat associé au cabinet Herbert Smith.
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