L'arrêt des exportations de cacao

La tension est à son comble depuis quelques jours sur le marché du cacao, où la tonne a bondi vers 2.254 dollars par tonne mercredi à Londres, avant de chuter en fin de séance. Le rebond des fèves affiche + 20 % en deux semaines. La spéculation se justifie par une vraie crainte sur les approvisionnements. Alassane Ouattara, le président de Côte d'Ivoire internationalement reconnu, a en effet proposé ce week-end l'arrêt total des exportations de cacao. Et la trêve est très suivie : « l'ABC du cacao », soit les trois mastodontes ADM, Barry Callebaut et Cargill, ainsi que les plus petits négociants comme Armajaro et Olam, ont suspendu leurs activités d'export, de peur de subir des sanctions sous forme de double taxe. Et ils seront bientôt obligés d'interrompre l'acheminement des marchandises dans le port de San Pedro dans le Sud du pays, faute de capacités de stockage. Objectif de cette trêve : assécher les ressources du clan Gbagbo, qui se finance actuellement avec les taxes du secteur cacaoyer. Principale source de revenu de l'État ivoirien, les taxes sur les fèves représentent 50 % de la valeur de la marchandise.DétournementsLa mise à l'arrêt de la filière cacao du premier pays producteur, avec 40 % de parts de marché, s'est traduite par une ruée sur la marchandise, ce qui fait grimper les échéances rapprochées. Car même si la saison de la récolte, qui court de novembre à février, est quasiment terminée, il n'est pas exclu que le cacao vienne à manquer si la situation perdure. De source de marché, les stocks londoniens sont aujourd'hui répartis entre deux industriels et un négociant. « On estime le tonnage de cacao bloqué en Côte d'Ivoire entre 100.000 et 300.000 tonnes, soit entre 8 et 10 % de la production mondiale », estime Eric Sivry, responsable du courtage de cacao chez Marex Financial à Londres. « Et même si le marché est attendu en léger surplus cette année, le fait que le principal pays producteur soit paralysé fait peser un vrai risque sur la disponibilité du cacao à court terme ». Les détournements de cacao, par la brousse et le Ghana, devraient toutefois accélérer. « Si les fermiers se retrouvent avec de la marchandise sur les bras, ils chercheront un moyen pour le vendre » assure un expert. Certains petits négociants contourneraient d'ailleurs la trêve. Mais « les industriels qui l'achètent prennent le risque de se voir reprocher de financer un dictateur » prévient un intervenant. Aline Robert
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