L'enfer des retraites

La réforme des retraites sera le plat chaud de la rentrée. Chacun affûte ses arguments pour défendre ou contrer le projet de réforme défendu par le gouvernement. Pourtant, dans un camp comme dans l'autre, le débat repose sur un mauvais diagnostic car il est fondé sur des présupposés qui faussent les données et masquent les véritables enjeux de la réforme des retraites. C'est du moins la thèse iconoclaste défendue par Bernard Friot dans son dernier opus. La démonstration, souvent convaincante, reste donc militante. Mais qu'importe. En remettant les compteurs à zéro, l'auteur force le lecteur à prendre du recul et à s'interroger sur l'évolution de nos retraites et leur rôle dans nos sociétés modernes. Reprenons depuis le début. Pour chacun, l'affaire est entendue : il y a un problème des retraites. Un problème démographique, d'abord, avec le passage d'un actif sur deux à la retraite d'ici à 2050. Absurde, répond l'auteur, aussi absurde que de prédire la famine en France avec l'effondrement du nombre des agriculteurs. Nos sociétés de longue vie sont plus productives que jamais et un retraité est tout sauf un inactif. Un problème financier ensuite, avec des déficits qui s'accumulent et donc la nécessité d'allonger la durée des cotisations pour sauver « le système par répartition ». Faux, aussi pour Bernard Friot, qui voit dans le déséquilibre comptable davantage l'effet du désengagement des entreprises dans le financement des retraites. Dans un PIB qui augmente, note l'auteur, il n'y a pas besoin de « déshabiller les actifs pour habiller les inactifs ». Ainsi, lors des cinquante dernières années, les pensions sont passées de 5 % à 12 % du PIB alors que, dans les cinquante prochaines années, elles devraient passer de 12 % à 20 % en cas de suppression de toutes les réformes menées depuis 1987. Un problème éthique enfin, pour rétablir la solidarité entre les générations. Là aussi, l'auteur refuse d'opposer les jeunes aux vieux, ces derniers étant finalement aussi des « salariés actifs » qui créent de la richesse et libèrent des emplois. En conclusion, ces réformes menées depuis 1987 tentent de casser une montée en puissance des institutions paritaires de retraite sans pour autant assurer leur pérennité. Décapant, parfois agaçant, mais toujours intéressant. Un livre utile pour les débats futurs. E. B. « L'Enjeu des retraites », de Bernard Friot. Éditions La Dispute (170 pages, 12 euros).
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.