« Les dépôts de bilan s'accélèrent, les PME sont au bout du système »

yvon jacob, président du groupe des fédérations industrielles (GFI)Le taux de défaillance des sous-traitants industriels s'est-il dégradé ?Depuis septembre, les dépôts de bilan sont en train de s'accélérer parce qu'on est au bout du système qui a permis aux entreprises de faire face en termes de trésorerie, et qu'elles recommencent à se heurter aux difficultés de financement de la part des banques.Avez-vous un ordre de grandeur des pertes d'emplois qu'engendre cette situation ?Environ 10 % des effectifs sont perdus, soit entre 50.000 et 60.000 personnes sur 600.000 dans la sous-traitance, essentiellement des intérimaires et des CDD. Les entreprises ne se sont pas attaquées aux CDI parce que des mesures ont été prises, comme le chômage partiel. Elles cherchent à garder leurs salariés, qui sont leur savoir-faire. Aujourd'hui, on peut craindre, sauf à ce que l'activité s'améliore, de commencer à voir le nombre de salariés en CDI baisser.Avec les prémices de la reprise, les PME peuvent-elles réinvestir ?Les entreprises de notre secteur ont dépensé beaucoup d'argent pour essayer de s'ajuster et sont désormais confrontées à un problème financier de fond : restructurer leur bilan parce qu'elles ont consommé des fonds propres pendant toute cette période. En général, elles n'étaient déjà pas très solides en termes de fonds propres. Au moment où l'activité se stabilise et se relance, les entreprises ont des besoins nouveaux de financement et de trésorerie. Les banques disent être présentes pour aider les entreprises, mais elles ne prêtent qu'à celles qui ont un profil rassurant, pour que le risque pris ne soit pas trop élevé.Quelles sont les solutions possibles ?Il faut que nous trouvions des formules permettant d'améliorer les fonds longs des entreprises, en réalité les fonds propres ou quasi-fonds propres, de façon que les banques puissent de nouveau prêter de l'argent à court ou à moyen terme dans des conditions classiques. Si nous ne sommes pas en mesure de trouver des solutions, nous allons au devant de très graves difficultés. Il existe un dispositif qui a bien fonctionné au début des années 1980. Il s'agit d'un prêt octroyé par un organisme financier, soit public, soit privé, qui, dans les deux cas, bénéficie d'une garantie à 100 % de l'État. De plus, ce prêt est considéré par le système bancaire comme des fonds propres.La création d'un nouveau fonds évoqué par Christian Estrosi pour aider la sous-traitance automobile est-elle la bonne solution ?Il a été évoqué l'idée de constituer à l'intérieur du FMEA un « sous-fonds » aidant les entreprises de sous-traitance automobiles à se financer afin de leur permettre d'investir et de se moderniser. Mais ce nouveau fonds serait essentiellement financé par des équipementiers de rang 1, c'est-à-dire les clients des sous-traitants. Si les intentions sont louables, la méthode n'est pas a priori la bonne : cela reviendrait à permettre aux équipementiers de choisir d'investir chez M. Dupond ou M. Durand plutôt que M. Dufour ou M. Duval sur des critères qui ne sont pas forcément objectifs. En tout cas, ils ne mettent pas l'ensemble des entreprises sur un pied d'égalité, surtout si elles doivent dépendre financièrement de leurs clients. Ce serait extrêmement gênant.Cela se ferait-il via des prises de participation ?Le FMEA intervient essentiellement sous forme de prise de participation dans les entreprises. Ce n'est pas la bonne méthode pour deux raisons : premièrement, parce que ces PME-PMI sont presque toujours des entreprises patrimoniales et il est toujours très difficile de convaincre des actionnaires familiaux de faire entrer un tiers dans leur capital ? même s'ils ont parfois tort. Deuxièmement, dans les circonstances actuelles, il existe un problème de valorisation des entreprises : quand une entreprise perd de l'argent et vient de perdre 30-40 % de son marché, sa valeur n'est pas très élevée. Il faut trouver d'autres méthodes.Propos recueillis par Michel Cabirol
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