L'édito de La Tribune : TV, une réforme mal née

Par Pierre-Angel Gay, directeur adjoint de la rédaction de La Tribune

«Errare humanum est, perseverare diabolicum». Rarement décision du chef de l'Etat n'aura mieux illustré cette locution latine. Depuis dix mois et l'annonce surprise de Nicolas Sarkozy de supprimer, dès janvier 2009, la publicité sur les antennes du service public, le projet de réforme que les députés examinent aujourd'hui, tourne à la pantalonnade. Non que son principe soit contestable, cette revendication est aussi vieille que la pub à la télé. Il s'agit de libérer les programmes du service public de la dictature de l'audience et de calquer France Télévisions sur un modèle mythique, la BBC. Mais comme souvent en France, on ne veut pas faire la réforme en entier. Ou, pour être plus exact, on ne veut pas la payer.

Refaire la BBC a un coût. La redevance outre-Manche s'élève à 182 euros par an quand en France, elle n'est que de 116 euros. Le président de la République ne voulant pas augmenter les prélèvements obligatoires, l'Etat a transformé la mise en place de la réforme et son financement, en un invraisemblable concours Lépine de l'exception culturelle française. Tout en mécontentant tous les professionnels des médias. Et même au-delà.

Pour n'être pas accusé de vouloir tuer l'audiovisuel public, Nicolas Sarkozy s'est engagé à ne pas en modifier le périmètre. Autrement dit, pour imposer une réforme que personne ne lui demandait, il s'est condamné sur tout le reste à... l'immobilisme. Puis, pour trouver de l'argent, il s'est proposé de mettre à contribution les «poches profondes» que sont les télévisions privées et les opérateurs télécoms. Ce qui l'a conduit à taxer les activités du futur pour financer celles d'aujourd'hui. TF 1 et M6 ont plaidé auprès des députés pour obtenir un rabais en cas de baisse de leur chiffre d'affaires publicitaire : autrement dit seuls les transferts de pub venant de l'audiovisuel public seraient imposés plein pot. Ce sont donc les chaînes de la TNT - dont les revenus sont, du fait de leur jeunesse, structurellement en croissance -, qui paieront de toute façon. Quant au numérique, il est lui aussi sollicité quelques semaines après la mise en place du plan Besson 2012 censé le dynamiser. Cherchez l'erreur.

 

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