Bulle sur la Formule 1

Par Valentin Petkantchin, économiste, auteur d'une étude sur le secteur de la Formule 1 (téléchargeable sur www.altermind.fr).

Contrairement aux idées reçues, la Formule 1 (F1) est un secteur d'ampleur aux vertus économiques, technologiques et, même, environnementales réelles. C'est d'abord un spectacle qui attire plus de 91.000 spectateurs en moyenne à chaque course de Grand prix et 600 millions de téléspectateurs par an dans le monde. Ce public constitue la richesse économique d'une "entreprise" internationale aux multiples activités.

La F1 présente ainsi un intérêt économique pour les chaînes de télévision qui ont payé en 2008 plus de 258 millions d'euros au détenteur des droits commerciaux de la F1, la Formula One Administration (FOA). La F1 est également un outil de promotion exceptionnel grâce auquel les entreprises atteignent avec efficacité leurs objectifs de communication commerciale. Elles ont ainsi versé plus de 569 millions d'euros en sponsoring à l'ensemble des écuries en échange de la visibilité de leur logo.

Enfin, les consommateurs bénéficient d'un ensemble d'innovations - des moteurs plus performants, des formes plus aérodynamiques, de meilleurs carburants, lubrifiants, etc. - testées en F1, avant d'être commercialisées ou intégrées dans les voitures destinées au grand public. Autant de facteurs qui permettent de produire des automobiles qui consomment moins et diminuent leur impact environnemental !

La F1 est aussi un catalyseur pour des innovations dans d'autres secteurs. Des solutions de communication mobile, des nouveaux matériaux, des produits dans le secteur de la santé ont trouvé un terrain d'essai favorable dans la F1 avant d'être offerts sur le marché. Ainsi, des prothèses légères en carbone, des fauteuils roulants pour handicapés, des incubateurs pour le transport de bébés malades ou des solutions de technologie télémétrique permettant le suivi à distance des patients sont issus de l'univers de la F1.

En dépit de ces qualités, la rentabilité globale de la F1 n'est pas assurée. Du moins pour les organisateurs de Grands Prix. Alors que leur principale source de revenus provient de la vente de billets, les seuls "forfaits de plateau" - payés à la FOA pour inscrire une course au championnat du monde - se sont récemment envolés au point de siphonner la majeure partie, voire la totalité, de ces revenus (à l'exception du Grand Prix de Monaco, où ils sont gratuits). Rentabiliser l'organisation d'un Grand Prix est ainsi devenu tout simplement impossible !

En 2008, les organisateurs de Grands prix ont ainsi perçu quelques 197,2 millions d'euros de recettes de la vente de billets mais ont dû payer... 274,4 millions d'euros en "forfaits de plateau". Une telle "inflation" est due à l'arrivée de grands prix hyper subventionnés en Asie et au Moyen-Orient, où les fonds publics sont versés pour la visibilité et sans logique de rentabilité. En 2008, la Chine a ainsi payé 22,6 millions d'euros, soit 55% de plus que l'Allemagne. Et cette année, Abu Dhabi verserait 30,6 millions d'euros...

Cette "bulle" de la F1 a déjà sonné le glas des Grands prix de France et du Canada qui ne figurent plus sur le calendrier 2009. Le Grand prix de Hockenheïm (Allemagne) pourrait être la prochaine victime en 2010 et la grande majorité des autres Grands Prix en Europe sont fragilisés, alors que la F1 demeure un secteur très européen. Pour préserver celui-ci dans son ensemble, il faut vite restaurer la rentabilité des organisateurs privés de Grands Prix !

A cet effet les "frais de plateau" devraient être largement réduits car les écuries - censées être financées par eux - le sont déjà par les droits TV et les sponsors. Les organisateurs de Grands Prix pourraient également toucher une partie substantielle des droits TV : c'est aussi grâce à eux que les courses de F1, retransmises à travers le monde, ont lieu et c'est bien le circuit de l'organisateur que les millions de téléspectateurs voient sur leur écran. Enfin, une partie plus importante des revenus de la publicité de piste, du sponsoring du Grand Prix ou des services d'hôtellerie pourraient leur revenir.

Il appartient aux différents acteurs et au détenteur des droits commerciaux de trouver la formule capable de restaurer la rentabilité structurelle des Grands Prix et de maintenir la F1 en Europe sans entraîner une débauche de fonds publics et une dépendance dangereuse à l'égard de pays pouvant très bien, en peu de temps, se désintéresser de la F1. La viabilité économique de ce secteur aux multiples atouts en dépend.

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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La formule 1 c'est has been! Comment peut on encore promouvoir une activité basé sur la pollution, la vitesse sur la route? L'économie nous fait toujours aller vers plus de pollution, penser qu'il est super de faire déplacer des milliers de gens à tr...

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