Non à un médiateur éternel

Par Eric Izraelewicz, directeur de la rédaction de La Tribune.

Inventé au plus fort de la crise, le poste de "médiateur du crédit" va donc être prolongé de quelques mois ? jusqu'à la fin de l'année 2010. C'est ce que Christine Lagarde a annoncé hier ? en lieu et place de Nicolas Sarkozy, empêché par un repos imposé. La nouvelle est, a priori, anodine.

Rien à en dire. En pleine crise bancaire, la fonction s'est révélée indispensable. Assuré avec beaucoup de doigté et médiatisé à l'envi par René Ricol, l'ex-président des experts-comptables, le job a permis d'aider de nombreuses entreprises, petites notamment, à échapper aux conséquences du "credit-­crunch". En favorisant le dialogue, toujours difficile, entre grands banquiers et petits entrepreneurs, en le forçant parfois, des milliers d'emplois auraient été sauvés ? pour un prix somme toute assez modique.

Rien à redire si ce n'est qu'on peut voir un inquiétant présage dans la décision de prolonger de plus d'un an la vie d'une institution qui ne devait, au départ, être qu'éphémère. Face à la crise, l'État a multiplié ses interventions dans l'économie. À l'instar du "médiateur du crédit", il a créé de nouvelles structures plus ou moins originales : un ministère de la Relance, un fonds stratégique d'investissement, une société financière de soutien aux banques, etc. On avait compris qu'il s'agissait-là d'institutions provisoires, destinées à disparaître une fois la crise passée.

S'agissant du médiateur de crédit, il est peut-être trop tôt pour affirmer qu'il n'a plus d'utilité. Compte tenu de la violence de la récession, un grand nombre de PME vont connaître, dans les mois à venir, de lourdes difficultés de trésorerie. Son entregent leur sera alors fort utile. Il ne faudrait pas pour autant que le médiateur devienne une administration, éternelle ? avec son budget, ses services, ses règlements, etc.

Le prolongement de son mandat, aujourd'hui, risque de lui en donner la tentation. Fin 2010, plus personne n'aura le courage, ni les moyens de le remettre en cause, de le supprimer. Demain, quand la crise sera finie, il faudra supprimer toutes ces institutions nées pour en atténuer les effets. Pas question de les pérenniser. Par chance, si l'on peut dire, Nicolas Sarkozy n'a pas pu présider hier la manifestation prolongeant le mandat du médiateur. Il aura, on peut l'espérer, moins de scrupule lorsqu'il faudra y mettre fin.

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