Réforme territoriale : peut mieux faire !

La réforme des collectivités qui vient d'être votée à l'Assemblée est loin du projet Balladur. Si leurs compétences se voient - un peu - clarifiées, les doublons, financements croisés et interventions non concertées continueront à exister. Le maintien de la compétence générale aux communes et intercommunalités leur permettront toujours d'intervenir tous azimuts. À l'évidence, le travail de réforme des échelons locaux n'a fait que commencer.

Le pire n'est jamais certain. Comme on le pressentait voici un an, les résistances à la modernisation de la décentralisation se sont montrées fortes et agissantes, y compris au sein de la majorité parlementaire. Les conservatismes, la défense des prés carrés sont venus limer la réforme prônée par Edouard Balladur et vivement souhaitée par le gouvernement, mais elles ne sont pas parvenues à totalement la neutraliser.

Condition d'une véritable efficacité, et d'économies substantielles aujourd'hui vitales, les compétences et les responsabilités des collectivités devaient être clarifiées, afin d'instaurer une vraie complémentarité, une coordination permanente entre régions et départements. Cette volonté de réforme en profondeur, le président de conseil général que je suis, bien qu'isolé, n'a cessé de la soutenir avec force.

Disons les choses : on n'a pas atteint l'idéal, loin de là. Mais on a progressé. A l'issue des débats parlementaires, les compétences - qui devaient initialement nourrir un débat approfondi en 2011 - n'ont fait l'objet que d'un toilettage. On ne les a pas vraiment restructurées, redistribuées comme il était souhaitable, mais on ne peut nier que l'existant a été amélioré.

C'est ainsi que départements et régions ne pourront plus intervenir dans le domaine de compétence légale de l'autre collectivité. Cette nouvelle règle, loin d'être anecdotique, va changer bien des choses, spécialement en matière d'aménagement du territoire et de développement économique. Prenons l'exemple de l'intervention économique : aux termes de la loi de 2004, c'est une compétence obligatoire des régions mais aussi des intercommunalités, et une compétence possible des départements. Dorénavant, elle sera recentrée sur la région, et les multiples guichets qui géraient l'économie locale dans la confusion la plus totale sont appelés à disparaître...

En fait, on voit clairement s'organiser deux pôles de la vie et de l'initiative locale. L'un de proximité : les communes et les intercommunalités dont les marges de manoeuvre restent pratiquement inchangées. Dans l'autre, les régions et les départements sont appelés à se "respecter" mutuellement, ce qui sera grandement facilité par l'instauration du conseiller territorial siégeant dans les deux assemblées.

Pour autant, il faut bien le reconnaître, il reste du travail pour l'avenir. Même en relevant la mise en place de quelques garde-fous par-ci par-là, on ne peut se satisfaire de ces politiques qui, au bout du compte, continueront de se concurrencer, de s'entrecroiser, de se gêner et de s'ignorer. C'est ainsi qu'en l'absence d'un texte attribuant la compétence à telle ou telle collectivité, les unes et les autres pourront toujours s'en saisir.

Et puis on n'a pas voulu trancher sur les compétences en matière de sport et de culture ; tout le monde pourra s'en mêler. C'est là, il est vrai, que les élus se montrent le plus !

Enfin, la compétence générale laissée aux communes et aux intercommunalités peut leur donner des idées d'intervention tous azimuts. On se console mal en songeant que leurs moyens financiers et la rigueur généralisée qui s'impose aujourd'hui les en préserveront mieux que tout. Oui, mais... départements et régions pourront toujours subventionner les projets des municipalités...

Donc, ne nous racontons pas d'histoires : on n'en a pas fini avec les financements croisés, les doublons, les interventions non concertées si coûteuses, si mangeuses de temps et d'énergie. On a progressé, oui, un peu, et en tout cas dans la mesure de ce qui était possible, compte tenu des intérêts "de classe" des élus et du manque d'intérêt évident des citoyens, pourtant très directement concernés par le bon fonctionnement de tous ces services publics de proximité gérés par les collectivités.

Avant longtemps, j'en suis certain, le législateur devra revoir cette question des compétences. D'ici là, ne nous lassons pas d'expliquer aux habitants de nos territoires combien la décentralisation est un enjeu majeur pour l'avenir, pour leur avenir.

Au fait, n'est-ce pas par les électeurs que l'intelligence vient aux élus ?

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