Management : où sont les femmes ?

Alors que les femmes ont sensiblement progressé au niveau de l'encadrement moyen, les statistiques restent terriblement démoralisantes au niveau des échelons supérieurs. Pourtant, de nombreuses études démontrent la valeur ajoutée des équipes de direction formées d'hommes et de femmes. Mais ces dernières ne doivent pas servir de simple alibi.

Il y a trente ans, l'Islandaise Vigdís Finnbogadóttir devenait une des premières femmes au monde élue à la tête d'un gouvernement. Elle a été par la suite réélue trois fois. Cet événement aurait pu donner le signal que les compétences des femmes en matière de leadership étaient aussi efficaces que celles de leurs collègues masculins. Et pourtant, trois décennies plus tard, les perspectives ne semblent guère réjouissantes.

Le nombre de femmes leaders a certes légèrement augmenté, mais leur proportion reste faible. En 2010, les femmes n'occupent que 90 sièges (17%) sur 535 au Congrès américain. Pourtant, les femmes occupent 49% des emplois aux États-Unis et 50 % de l'ensemble des postes de managers. Mais alors que les femmes ont substantiellement progressé au niveau de l'encadrement moyen, les statistiques restent terriblement démoralisantes au niveau des échelons supérieurs. En 2010, selon le classement du Fortune 500, seuls 2,8% des dirigeants d'entreprise sont des femmes.

Il existe quelques lueurs d'espoir. En Norvège par exemple, 44% des membres de conseils d'administration sont des femmes. Et ce n'est pas un hasard mais le fruit d'une loi contraignante imposant des quotas. L'Espagne et la France envisagent sérieusement de suivre cet exemple. Les entreprises annoncent également des objectifs ambitieux, comme Deutsche Telekom qui vise 30 % de femmes dans ses postes de direction d'ici à quatre ans. Elles agissent ainsi non pas par altruisme mais par intérêt économique. Un grand nombre d'études démontrent la valeur ajoutée des équipes mixtes. Par exemple, les entreprises possédant plus de trois femmes dans leur management réalisent une meilleure rentabilité sur fonds propres que les autres. Leur score en matière de performance organisationnelle est également plus élevé. De même, les femmes siégeant dans les conseils se préparent sérieusement avant chaque séance, ce qui incite leurs collègues masculins à en faire de même.

Mais, à quoi ressemble la vie des femmes qui occupent déjà ces positions ? Quand une minorité constitue moins de 15% d'une catégorie sociale, on parle alors d'alibi. Et toutes les personnes se trouvant dans cette position subissent une énorme pression, car elles ont le sentiment de ne pas représenter seulement elles-mêmes mais leur catégorie tout entière. À partir de 25% - un taux qui constitue désormais l'objectif de nombreuses entreprises -, elles représentent toujours une minorité, mais elles ne sont plus des alibis. Le taux de basculement se situe à 35% ; une fois ce niveau atteint, leur visibilité diminue et leur identité de femme devient moins déterminante. Ensuite, au-delà de ce taux de 35%, lorsqu'une femme parle, elle est perçue en tant qu'individu et non plus en tant que "femme ".

Il existe actuellement si peu de femmes aux postes de direction qu'elles y sont perçues comme des outsiders. Cette marginalisation crée un déficit de légitimité car elles ne correspondent pas au stéréotype dominant (masculin) du leader, toujours associé à un comportement "autoritaire". Alors que les femmes, par contraste, sont associées à des "valeurs communautaires", à une attitude plus amicale et attentionnée.

De nombreuses femmes en concluent que la seule manière d'asseoir leur légitimité est d'imiter leurs pairs masculins. La réponse est loin d'être aussi simple. En imitant le comportement des hommes, elles violent les stéréotypes de leur sexe et créent une impression pénalisante d'inauthenticité. Les femmes seraient mieux inspirées de combiner les deux ensembles de valeurs, féminines et masculines.

Indra Nooyi, la CEO de PepsiCo, le fait très bien. Elle sait prendre des décisions difficiles mais son entourage la décrit aussi comme extrêmement chaleureuse. Et à l'avenir ? En dépit de statistiques décevantes, on assistera, dans les cinq à dix prochaines années, à des changements considérables, et en mieux. Les femmes managers contribueront à cette amélioration, d'une part, en comprenant qu'il existe des attentes en matière de leadership organisationnel et, d'autre part, en développant leurs compétences en conséquence.

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