Deux millions et après

Par Philippe Mabille, rédacteur en chef et éditorialiste à La Tribune.

Syndicat, que faire de ta victoire annoncée ? La journée de mobilisation contre la réforme des retraite est déjà un succès - on ne parle que de cela - et l'on peut parier que le score du 24 juin (2 millions de manifestants) sera dépassé, en tout cas dans les comptages syndicaux. Pour paraphraser François Chérèque, le leader de la CFDT, ce 7 septembre, préparé tout l'été, est bien le tournant du quinquennat. C'est la première fois depuis la bataille contre le CPE de Dominique de Villepin qu'un tel rapport de forces est institué.

La différence, c'est qu'à l'époque Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur, avait joué les pompiers auprès des leaders syndicaux pour obtenir... le retrait du texte considéré comme antijeunes. Cette fois-ci, la situation est inversée. C'est Nicolas Sarkozy, président de la république, qui a voulu cette réforme des retraites pour réparer des finances publiques éprouvées par la crise. Alors qu'une nouvelle journée de mobilisation est annoncée pour le samedi 18 septembre, parier sur une rupture du front syndical comme en 2003 serait hasardeux.

La rue ne se contentera pas des concessions déjà programmées en coulisse par le truchement du très habile conseiller social de l'Élysée. Il faudra aux syndicats une victoire visible, même si elle est petite, pour montrer à l'opinion que le rapport de forces n'a pas été vain. Raymond Soubie le sait bien : dans les conflits, il faut veiller à ce qu'aucun des protagonistes ne sorte humilié. Lâcher sur la périphérie pour ne rien céder sur le coeur de la réforme. Les syndicats ne s'y trompent pas. Ils jouent sur le sentiment d'injustice engendré par la réforme, mais ne contestent pas la nécessité d'apporter un début de réponse financière au défi démographique des retraites.

En fait, le sort de la réforme ne se joue pas dans la rue, mais au parlement. C'est bien là, dans les amendements des députés, que des inflexions inattendues sont possibles. Et c'est bien ce ventre mou parlementaire que redoute le plus le patronat, qui craint de devoir passer à la caisse pour préserver les chances de Nicolas Sarkozy de l'emporter en 2012.

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