Le dollar et la Fed

Par Jérôme Marin, correspondant de La Tribune à New York.
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Habitué aux auditions parfois musclées au Congrès, Ben Bernanke s'apprête ce mercredi à affronter un adversaire encore plus coriace : la presse américaine. A Wall Street, tous les regards seront donc tournés vers Washington où le président de la Réserve fédérale répondra aux questions des journalistes. Une première dans l'histoire de cette institution presque centenaire. Pour se préparer, Bernanke aurait demandé quelques conseils à son homologue européen Jean-Claude Trichet, rompu à un exercice auquel il se livre depuis près de huit ans. Etape importante dans la volonté de la Fed de mieux communiquer, cette conférence de presse n'en est pas moins périlleuse. Car elle intervient à deux mois de l'arrêt annoncé de la deuxième phase d'assouplissement quantitatif (QE2) et quelques semaines après la hausse des taux directeurs de la Banque centrale européenne.

Dans les commentaires de Ben Bernanke, chacun tentera de déceler des brides d'indices sur le chemin qu'entend suivre la Fed au cours des prochains mois pour sortir de sa politique monétaire ultra-accommodante. Et les spéculations vont bon train : sur le sort du "quantitative easing", sur le calendrier du relèvement des taux ou encore sur les dissensions entre les banquiers centraux... Tout cela se traduit notamment par une chute du dollar. La semaine dernière, le Dollar Index, qui résume l'évolution du billet vert face à un panier de six devises, a touché son plus faible niveau en trois ans. Et il n'est plus très loin de son plus-bas historique, atteint en mars 2008. Or, un dollar faible dope généralement les cours des actions des entreprises américaines. Depuis le début de l'année par exemple, la monnaie américaine s'est repliée de 6,5%. Dans le même temps, le S&P 500 s'est apprécié de 6%. Une simple coïncidence ?

Les premiers résultats trimestriels publiés ces dernières semaines fournissent un élément de réponse : la faiblesse du dollar gonfle artificiellement les chiffres d'affaires et les profits des grandes multinationales. Le rendement de leurs titres s'améliore : ils deviennent plus attractifs pour les investisseurs, ce qui se répercute mécaniquement sur les cours. "Nous aimons un dollar faible", résumait ainsi Keith Sherin, le directeur financier du conglomérat géant General Electric. Chez IBM, la croissance des ventes sur les trois premiers mois de l'année a été renforcée de 3 points par l'évolution favorable des changes. McDonald's s'attend de son côté à un impact positif de 15 à 17 cents sur son bénéfice annuel par action - soit un gain de 3%.

"Le vrai coup de pouce du dollar ne se traduit pas encore dans les résultats, nuance Michael Yoshikami, d'Ycmnet Advisors. Cela commencera vraiment le trimestre prochain." A Wall Street, les investisseurs espèrent donc que la Fed ne se montre pas trop pressée pour resserrer sa politique monétaire. Car cela pourrait inverser les mouvements sur les devises. Et ainsi contrarier un rally haussier qui cherche déjà un second souffle.

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