Grèce : attention, défaut en vue !

Par Stuart Thomson, chef économiste chez Ignis Asset Management.
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La tragédie grecque est une tragédie en quatre actes, et non en deux. Autrement dit, nous ne croyons pas que le pays fera défaut à court terme, mais nous en avons la quasi-certitude à moyen terme.

Le plan d'austérité adopté par la Grèce est le pire en son genre : il privilégie les hausses d'impôts plutôt que la réduction des dépenses et a toutes les chances de prolonger la récession et de se traduire par une augmentation du chômage et des déficits. La fuite des capitaux et les risques liés à l'exécution de ce programme d'austérité budgétaire et de privatisation donnent à penser qu'une autre crise va éclater dans les douze prochains mois. Cette crise mettra en évidence le fait qu'ajouter encore un peu plus de dette à des niveaux d'endettement déjà non viables est en définitive contre-productif. Nous pensons que la Grèce continuera à poser un problème jusqu'à ce que l'inévitable défaut se produise et craignons que le déblocage en septembre de la nouvelle tranche de l'aide accordée par le FMI ne soit une échéance difficile.

La principale question qui demeure est la suivante : le défaut se fera-t-il de manière ordonnée ou non ? Un défaut ordonné interviendrait à la condition que les autorités grecques soient parvenues à un excédent budgétaire primaire leur permettant de s'autofinancer au quotidien. Cela pourrait se faire au sein de la zone euro, c'est-à-dire sous la forme d'une dévaluation de la dette plutôt qu'une dévaluation de la devise. Cependant, les autorités auraient toujours besoin de fonds pour renflouer le système bancaire. Il y aurait également un phénomène de contagion aux autres pays périphériques européens plus petits, dans la mesure où les investisseurs s'attendraient à des mesures similaires en Irlande dans un premier temps, puis au Portugal. Les dommages pour l'Espagne et l'Italie seraient toutefois plus faciles à contenir. Un défaut non ordonné aurait pour effet la faillite immédiate de l'Etat grec et sa sortie plus que probable de la zone euro. L'effet de contagion serait pire pour tous les autres pays Piigs.

Pour paraphraser Donald Rumsfeld, la crise grecque actuelle présente des inconnues connues et des inconnues non connues. Nous sommes d'avis qu'un défaut de la Grèce sur sa dette est surmontable, mais pas son effet de contagion aux autres économies périphériques. Nous n'anticipons pas un défaut dans l'immédiat, mais continuons de penser qu'il s'agit du dénouement le plus vraisemblable dans les dix-huit prochains mois.

Comme l'a fait observer Ben Bernanke récemment, les fonds monétaires américains sont la principale source de contagion. Ils sont en effet à l'origine de près de la moitié du financement à court terme des banques européennes et certains signes récents tendent à indiquer que les investisseurs se méfient des fonds fortement exposés aux banques européennes. Une disparition de cette source de capitaux pourrait une nouvelle fois geler les marchés monétaires, réduire la liquidité au niveau mondial et entraîner un mouvement de fuite vers la qualité.

Milton Friedman avait prédit que l'euro ne survivrait pas à la première récession. La détermination politique a fait en sorte que si, mais l'euro aura bien du mal à survivre à la prochaine. Le niveau du taux directeur de la BCE est de plus en plus un frein à la croissance et les indicateurs avancés laissent entrevoir un ralentissement dans les principaux pays européens d'ici à la fin de l'année.

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