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Face à la crise du pouvoir d'achat, Nicolas Sarkozy a appelé hier les entreprises à distribuer davantage d'argent au titre de l'intéressement et la participation. Une bonne solution?

Pourquoi pas ? Disons quand même qu'il s'agit là d'un détournement d'outil. L'intéressement et la participation, c'était une invention du Général de Gaulle. L'idée, c'était d'intéresser les salariés à la vie de leur entreprise, de les faire participer à son capital, c'était dans un souci de réconciliation entre le capital et le travail, que l'entreprise partage ses bénéfices avec ses salariés. Il ne s'agissait donc pas, comme aujourd'hui, de distribuer du pouvoir d'achat. On avait, à l'époque, de plus nobles ambitions !

Cela étant, aujourd'hui, comme l'Etat n'a pas d'argent, qu'il ne peut donc plus faire ni de cadeaux fiscaux, ni de grands travaux, qu'il comprend l'angoisse des Français face à la baisse de leur pouvoir d'achat, il appelle les entreprises à en distribuer. Comme il ne peut pas les obliger à augmenter les salaires, il va les inciter à distribuer une plus grande part de leurs profits. Le président de la République souhaite, il l'a dit hier, un doublement des sommes distribuées à ce titre d'ici quatre ans. C'est ambitieux.

Rien n'assure que les entreprises exhausseront son souhait?

C'est vrai. Une loi va les y inciter. Tout dépendra alors de la force de ces incitations. On parle d'un crédit d'impôt, d'une carotte fiscale qui sera accordée aux entreprises qui signent, pour la première fois, un accord d'intéressement, à celles aussi qui augmentent les sommes qu'elles distribuent. L'idée, c'est de généraliser l'intéressement. Pour l'instant, il n'est obligatoire que dans les entreprises de plus de 50 salariés. Il n'y a de fait que 4 millions de salariés qui en bénéficient. Le gouvernement souhaite que tous les salariés aient accès à l'intéressement, qu'ils travaillent dans des entreprises de plus ou de moins de 50 salariés, qu'ils travaillent aussi d'ailleurs dans l'administration, dans les ministères par exemple. Là, le calcul des profits sera plus difficile !

Justement, pour que les entreprises distribuent une partie de leurs profits à leurs salariés, il faut qu'elles en fassent...

Exact. Et là, on peut se demander si l'appel du président intervient au moment le plus opportun ! Avec le ralentissement de l'activité, avec la crise, les entreprises elles aussi voient leur pouvoir d'achat diminuer. Pas sûr qu'elles fassent, dans les années qui viennent, des profits plantureux, qu'elles aient donc les moyens d'en distribuer beaucoup à leurs salariés - surtout si l'on considère que, pour préparer l'avenir, elles devront aussi accroître leur effort d'investissement.

Et puis, dans la politique de Nicolas Sarkozy, il y a un autre élément qui vient brouiller le message. Le gouvernement dit qu'il veut inciter les entreprises à distribuer de l'intéressement. Dans le même temps, il l'a déjà annoncé, pour réduire le trou de la Sécurité sociale, il s'apprête à taxer ce même intéressement. Il demande donc aux entreprises de distribuer davantage de pouvoir d'achat sans augmenter les salaires, un pouvoir d'achat qu'il s'apprête immédiatement à taxer ! Difficile, avouons-le, d'y comprendre quelque chose !

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