Un café avec… Philippe Blanchard, chef du bureau de Brunswick Group à Bruxelles

Avec ce post, le Blogeurope inaugure une série sur les hommes et les femmes d'influence qui feront la prochaine mandature. Qui sont-ils ? Pour qui travaillent-ils ? Comment lisent-ils l'actualité européenne ? La Tribune passe derrière le décor du théâtre bruxellois... pour mieux saisir les ressorts de l'intrigue.

Le plafond est bas, la déco quelconque. De toute évidence le bureau bruxellois de Brunswick, le « McKinsey » de la communication financière, n'a pas été conçu pour bluffer les clients. Ses 80 partenaires préfèrent les courtiser ailleurs, là où siègent les états-majors, à Paris, Berlin, New-York et surtout Londres où sont postés 200 des quelque 600 collaborateurs du groupe. Bruxelles a été jusqu'à présent un pied à terre pour les associés venus plaider auprès de la « DG Comp », le gendarme européen de la concurrence, les acteurs de fusions-acquisitions nouées ailleurs. Cela devrait changer. Philippe Blanchard est un peu là pour cela : déplacer l'avantage acquis par Brunswick dans la communication financière vers les "affaires européennes", autrement dit le lobbying. « L'idée, c'est de faire maintenant autre chose », dit-il.

Les contrats rentrent. Cinq grands comptes en cinq mois: le nouveau partenaire de Brunswick ne connaît pas la crise.

A-t-il sacrifié au devoir de transparence du "professeur Kallas", le commissaire européen qui a ouvert l'an dernier un registre des lobbyistes où les cabinets doivent nommer leurs clients ? Il y pense, mais il n'y pas d'urgence. « Il faut habituer les partenaires à cette idée. Et en parler aux clients... Le registre, c'est comme les impôts. On paye à n+1 ». Il y a toutefois des missions qu'on ne peut mener qu'en pleine lumière. Depuis des semaines il court Paris comme Bruxelles pour plaider la cause de Nordstream, le gazoduc qui doit amener le gaz russe vers l'Allemagne via la Baltique et dont le premier « avocat » n'est autre que l'ancien chancelier allemand Gerhard Schröder.

La sécurité d'approvisionnement énergétique sera un « vrai sujet » pour la prochaine mandature, assure-t-il. De tous les projets de « tubes » destinés à alimenter l'énorme marché européen depuis l'Est, celui dont il défend les intérêts est certainement le plus avancé. Au Sud de l'Ukraine, Southstream et Nabucco (via la Turquie) reposent sur des alliances complexes ou incomplètes, alors que Nordstream jouit du fondement solide des liens germano-russes. Mais à l'entendre, le jeu est ouvert. « Tous les projets sont bons. Vus les besoins en gaz de l'Europe, il n'y a pas photo. Construisons des pipes. Il y a de la place pour tout le monde ». A l'entendre, le grand jeu énergétique entre les Américains « obsédés à l'idée d'aller sur la Caspienne et en Irak », les Russes qui seront « forcément partie prenante » même du projet turco-européen Nabucco et les Européens eux mêmes sera une des grandes affaires des prochaines années. Pour sa plus grande joie.

Les services financiers forment l'autre pilier bruxellois de Brunswick. En neuf mois, la crise a dopé un agenda législatif qui était déjà considérable: réforme de la supervision, réglementation des hedge funds, révision de législation bancaire, revue de celle sur les titres sans parler de toute la législation secondaire (la "comitologie") qui à l'avenir sera visée par le Parlement. "On a un énorme paquet sur la table", dit Philippe Blanchard. La moitié des clients du groupe sont des opérateurs financiers : banques, assureurs, fonds de private equity et hedge funds. Travailler pour des acteurs majeurs de la City, n'empêche pas le consultant français de penser que "le modèle de réglementation anglo-saxon va devoir évoluer" et de saluer "à titre personnel" le "discours de Rasmussen", le leader socialiste européen danois devenu en deux ans le plus virulent critique du "capitalisme financier". Sous la prochaine mandature, le débat parlementaire sur ces sujets ardus sera plus politique que jamais. Autant ne pas sous-estimé les parties prenantes, même si elles ne sont pas forcément dans le camp de ses clients. Français, mais fair play.


F.A.




 

 

 

 

 

 
 
 
 

 

 



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