Le déficit de confiance, voilà le problème

Par Marc Fiorentino, de Monfinancier.com.
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La situation actuelle en France est paradoxale. Certes, le paysage économique est mauvais. En termes de croissance, de dettes, de déficit, de chômage. Mais la France est plus déprimée que la plupart des pays dans le monde en général et en Europe en particulier avec une position qui n'est pourtant pas dramatique. Nous sommes loin des 22 % de chômage espagnol, des 200 % de déficit japonais, des taux de décroissance grecs ou italiens. Faut-il se contenter de ne pas être dans les derniers de la classe ? Non. Mais il faut avoir conscience de la réalité de la situation.

Prenons le cas des États-Unis. Objectivement, leur situation économique est catastrophique, leurs fondamentaux déplorables et, pourtant, depuis quelques mois, et encore pour quelques mois, la machine recommence à tourner. Lentement. Très lentement même si on compare cette sortie de crise aux sorties de crise précédente. Et la surprise vient de la consommation des ménages. Avec un taux de chômage historiquement élevé et des revenus qui ne progressent pas, les ménages dépensent plus. Comment ? En puisant dans leur épargne.

Rappelons que les ménages américains avaient un taux d'épargne NÉGATIF de 3,5 % avant la crise. Depuis trois ans, ils ont découvert l'épargne et, en particulier, l'épargne de précaution. Leur taux d'épargne a progressé de près de 10 %, pour atteindre les + 6 %. Un taux médiocre dans l'absolu mais exceptionnel pour les États-Unis. Or, depuis quelques mois, ce taux d'épargne chute. Il a atteint les 3,5 % à la fin de l'année 2011. Les ménages américains ont repris un peu confiance et éprouvent moins le besoin de maintenir autant d'épargne de précaution. Il est trop tôt pour savoir si ce regain de confiance est réaliste mais, pour l'instant, il alimente une reprise de l'économie.

En France, nous sommes dans la situation inverse. Les ménages français ne consomment plus. Les dépenses des ménages en biens ont même reculé de 0,1 % en novembre. L'Insee prévoit une croissance de 0,3 % pour toute l'année 2011 et de 0,1 % pour les deux premiers trimestres de l'année 2012. Zéro ou presque donc. Et, pendant ce temps, l'épargne explose. Notre taux d'épargne est proche de 17 %, un record mondial, deux fois plus que les "fourmis" japonaises. Les Français n'ont pas confiance en l'avenir, ils n'ont pas confiance dans la capacité du gouvernement à gérer les finances publiques ni dans la capacité des candidats à l'élection présidentielle à apporter des vraies alternatives crédibles. Et ils ne veulent donc pas prendre de risques. Ils ne veulent pas toucher à leur épargne. Au contraire. Ceux qui le peuvent épargnent encore plus. Toujours plus. Un simple retour à un taux d'épargne "normal" procurerait à l'économie française une formidable bouffée d'oxygène. Sans résoudre les problèmes de fond, cela créerait une petite dynamique.

Mais les Français ne sont pas prêts à prendre le risque de puiser dans leur bas de laine. Le principal problème de la France n'est ni sa dette ni son déficit budgétaire, c'est le déficit de confiance, un déficit justifié.

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Commentaire 1
à écrit le 10/01/2012 à 1:16
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Si l'on exclue provisoirement les avancées des neurosciences sur la confiance (trust vs confidence ; oxytocine, etc.), de nombreux chercheurs en sciences sociales qui ont planché sur cette thématique ont identifié de manière à peu peu consensuelle - ...

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