L'industrie verte ne se fera pas sans usines

ANALYSE. D'ici 2050, Bpifrance ambitionne l'ouverture de 250 nouveaux sites industriels par an, contre seulement 150 aujourd'hui. Mais comment les Français accepteront-ils ces nouveaux sites industriels à proximité de leur lieu de vie ? Aujourd'hui encore, les usines souffrent d'une image connotée dans l'imaginaire collectif : asservissantes, polluantes, avilissantes... Toutes ? Non ! L'usine verte est une fenêtre ouverte vers une nouvelle industrie, vertueuse et porteuse d'espoir pour notre modèle sociétal et environnemental. Par Virginie Saks, associée du cabinet Compagnum, experte sur l'industrie verte, et Emmanuelle Obligis, directrice immobilier et secteur privé de la SCET, filiale de la Caisse des Dépôts.
(Crédits : EU)

L'usine verte est emblématique de ce que l'on appelle aujourd'hui l'industrie verte : une industrie efficace sur le plan environnemental, respectueuse des ressources, inclusive et souveraine. C'est également une usine qui s'inscrit harmonieusement dans les territoires et qui en a intégré ses enjeux, en termes de sobriété énergétique et de maîtrise des ressources en eau par exemple. L'usine verte apporte également des solutions concrètes à la rareté foncière, un enjeu d'autant plus grand depuis la loi climat et résilience par le Zéro Artificialisation Nette des sols.

Depuis l'usine de Lacroix à Beaupreau-en-Mauges (Maine-et-Loire), qui met à profit la technologie au service de l'efficacité environnementale, en passant par celle de Mob-ion à Guise (Aisne), site emblématique de l'industrie circulaire, et celle de Lemahieu à Saint-André-lez-Lille (Nord), militant du Produire en France, les usines vertes prennent de nombreux visages.

Quelles sont les caractéristiques de ces usines ? En premier lieu, elles utilisent la technologie pour décarboner l'industrie. Par exemple, certains industriels recourent à l'usage d'objets connectés et d'algorithmes poussés pour piloter au plus juste la consommation énergétique ou à la mise en place de solutions innovantes comme le partage de chaleur fatale.

Mais la technologie ne fait pas tout. L'usine verte doit également être respectueuse des ressources locales, à commencer par le foncier. La pression est aujourd'hui forte sur les collectivités territoriales qui doivent arbitrer entre les besoins de nouveaux logements et le développement d'activités économiques.

Relever les défis de l'eau et du foncier

Fort de ce constat, toute usine qui témoignerait d'un usage raisonné du foncier fait un grand pas vers une démarche de développement durable. Certaines entreprises, comme CETIH, ont déjà pleinement intégré cet enjeu de densité et rapportent la valeur ajoutée produite (en euros) à la surface de leur usine (en m2). Les efforts de densification sont aussi encouragés à travers des opérations mixtes verticales (logement/bureaux/activités ou stockage).

L'exploitation des friches industrielles est, dans ce cadre, enfin au cœur du sujet. Il n'est pas rare que des entreprises, ETI ou grands groupes, en fassent un axe structurant de leur politique RSE malgré de possibles surcoûts en matière de dépollution.

Toutefois, le respect des ressources dépasse le seul usage du foncier. La question de l'eau est également stratégique. Faire un diagnostic de son usage en eau semble aujourd'hui incontournable. Cela permet d'anticiper les crises possibles telles que les sècheresses et de mieux faire face à de possibles restrictions. À cette fin, Bpifrance propose des diagnostics éco-flux.

Économie circulaire et relocalisation

Une usine verte, c'est aussi une industrie circulaire. Elle identifie toutes les synergies avec les acteurs économiques locaux pour optimiser l'usage des matières premières ou de l'énergie. Backstar à Béthune ou Constellium à Issoire ont par exemple installé des chaudières collectives et ou mis en place des réseaux de chaleur.

L'usine verte, c'est enfin une usine qui donne du sens. Relocalisation de produits essentiels, fabrication française, consommation raisonnée... Chez Lemahieu, qui produit du textile made in France, une usine verte est une usine qui produit à la demande et adopte une fine gestion de ses stocks.

Dès lors, comment accélérer l'ouverture d'usines vertes en France ?Avant tout, le cadre législatif doit évoluer pour faciliter l'implantation sur des friches industrielles, inciter les pratiques d'industrie circulaire. C'est l'enjeu du projet de loi actuel sur l'industrie verte, dont un volet concerne le foncier et l'ouverture d'usines. Nous accorderons une importance toute particulière aux dispositions qui limiteront les risques d'implantation sur les friches industrielles et permettront, par exemple, une meilleure maîtrise des coûts de dépollution.

Mais au-delà de la loi, il faut également former aux fondamentaux de l'usine verte. Deux publics sont concernés : les industriels, d'une part, afin de les inspirer sur les meilleures pratiques, et les territoires, d'autre part, afin d'accompagner efficacement les projets industriels vertueux.

A cette fin, nous avons construit une boîte à outils de l'implantation à destination des entreprises et des acteurs publics, que nous diffusons largement pour une réindustrialisation verte et vertueuse de tous nos territoires.

Nous sommes convaincues que l'industrie représente aujourd'hui l'un des leviers majeurs permettant de répondre à l'urgence environnementale. N'attendons plus : accélérons son déploiement dans tous nos territoires avec des sites de production verts et vertueux, acceptés de tous !

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Commentaire 1
à écrit le 31/03/2023 à 9:30
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L'Usine verte existe déjà, depuis la création de notre Monde, pas la peine d'en construire des artificielles ! :-)

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