L'Iran est en échec... mais loin d'être mat

Le Rial iranien a perdu plus de la moitié de sa valeur contre le billet vert depuis le début de cette année ? Routine pour l'économie de ce pays qui en connu bien d'autres car, depuis la fin de la guerre avec l'Iraq, chaque Président iranien a effectivement été confronté à une crise monétaire. Par Michel Santi, économiste (*).

 De 1989 à 1997, sous Rafsandjani, le cours official du Rial ne s'est-il pas effondré de 72 à 1.755 pour un dollar, tandis qu'au marché noir il passait de 1.200 à 4.750 ? Président de 1997 à 2005, Khatami ne fit guère mieux car le Rial devait perdre 80% de sa valeur sous son règne, franchissant la barre des 9.000, pour ensuite atteindre les abysses à 25.000 sous Ahmadinejad (2005 à 2013). L'Histoire ne fait donc que se répéter avec le Président Rouhani qui a néanmoins fait de son mieux pour tenter d'améliorer la situation puisque - contrairement aux affirmations de Donald Trump qui prétend que l'inflation iranienne atteint des sommets - celle-ci se situe à des niveaux exceptionnellement bas autour des 10% voire à un seul chiffre depuis deux ans, sans précédent depuis la Révolution Islamique de 1979 car les iraniens étaient plutôt habitués à un taux d'inflation de l'ordre de 18 à 20% depuis une trentaine d'années.

L'économie de l'Iran ne montre donc aucun signe de liquéfaction car, si le chômage stagne à environ 12%, la bourse de Téhéran, elle, a progressé de 30% ces trois derniers mois. Elle ne représente certes - en capitalisation - que le tiers du P.I.B. national mais ne montre aucun signe de panique suite au regain de tension avec les Etats-Unis. C'est évidemment par ses exportations pétrolières que l'Iran est le plus vulnérable car ce secteur compte pour près de 14% dans l'activité économique du pays. Alors qu'elles étaient pourtant parvenues à se rétablir à plus de 2.3 millions de barils/jour - au plus haut depuis 2008 -, elles sont aujourd'hui les premières victimes de l'escalade puisqu'elles se sont effondrées de 25% depuis l'annonce du retrait américain de l'accord nucléaire. Les sanctions US ont en effet provoqué le retrait de nombre d'acheteurs majeurs de pétrole iranien, dont l'Union Européenne qui a acquis pour 40% de brut en moins de ce pays depuis avril dernier. Pour autant, c'est la perte du marché sud-coréen, qui représentait 60% des exportations iranienne de pétrole, qui aura les répercussions les plus graves sur ce secteur et par-delà sur l'ensemble de l'économie du pays, car la Corée du Sud n'était pas contrainte de respecter l'embargo pétrolier américain sur l'Iran à l'époque d'Obama.

Le pari de Trump et de son administration est de mettre à genoux l'économie iranienne et de forcer ainsi ce pays à une reddition sans condition, en tous cas selon les termes américains. Néanmoins, s'il est vrai que le plus dur reste encore à venir pour l'Iran du point de vue économique et financier suite à la volte-face américaine, cette nation a du ressort et son économie semble encore loin de capituler.

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(*) Michel Santi est macro économiste, spécialiste des marchés financiers et des banques centrales. Il est fondateur et directeur général d'Art Trading & Finance.

Il est également l'auteur de : "Splendeurs et misères du libéralisme", "Capitalism without conscience", "L'Europe, chroniques d'un fiasco économique et politique", "Misère et opulence". Son dernier ouvrage : "Pour un capitalisme entre adultes consentants", préface de Philippe Bilger.

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Commentaires 2
à écrit le 10/09/2018 à 20:46
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Encore un étonnant article défendant un régime totalitaire qui a du sang sur les mains. Je ne confierais pas beaucoup de mon argent quand ce prétendu économiste affirme que l'économie iranienne est à peine affectée par la décision de Trump d'arrêter...

à écrit le 10/09/2018 à 17:17
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"cette nation a du ressort et son économie semble encore loin de capituler." LE trump bashing général qui fait l’unanimité chez les néolibéraux, dont vous ne me faites pas partie mais aussi chez les gauchistes en tout genre (quand même pas ???), ...

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