La sortie de crise est une opportunité unique pour les entreprises de renouveler leur pacte social

La crise sanitaire mondiale dont nous espérons voir aujourd'hui le bout a agi comme un formidable accélérateur des façons de travailler en entreprise. Face au travail hybride, le rôle des managers de proximité sera crucial. Plus de liberté avec plus d'exigence sur les résultats. C'est dans cette actualisation du rapport droits/devoirs que se fondera le nouveau pacte social des entreprises. Par John Hazan, Associé chez Bain & Company, Expert Management et Transformation des entreprises.
(Crédits : AdobeStock)

La crise sanitaire mondiale dont nous espérons voir aujourd'hui le bout a agi comme un formidable accélérateur des façons de travailler en entreprise. C'est simple, en dix-huit mois, nous avons fait un bond dans le futur que beaucoup pensaient inaccessible. Dos au mur, nous nous sommes (re)découvert une formidable capacité d'adaptation pour surmonter cette période de « grand confinement » et en tirer profit : nous avons modifié nos habitudes de travail et déployé de nouveaux outils de mobilité et de connexion à distance avec une rapidité étonnante. Nous avons redécouvert les bénéfices du télétravail que beaucoup de leaders et de managers regardaient avec méfiance. À présent que le contexte sanitaire autorise le retour au bureau, la grande interrogation concerne la place qui va être accordée au télétravail : que faire de ce mode de collaboration adopté massivement depuis plus d'un an et qui reste aujourd'hui attractif pour 50% des salariés ?

Si certains dirigeants sont tentés de revenir à un fonctionnement pré-Covid, les entreprises les plus innovantes ne s'y trompent pas : Google, Amazon et Microsoft ont déjà annoncé la pérennisation de modes de fonctionnement hybrides. Twitter et Facebook vont plus loin et proposent à leurs collaborateurs de travailler à temps plein en télétravail s'ils le souhaitent. En France, les sociétés du CAC 40 commencent à leur emboiter le pas. Elles sont 80% à envisager une jauge maximale de 2 à 3 jours de télétravail pour leurs collaborateurs.


Des modèles d'organisation hybrides pour attirer et retenir les talents


Faut-il ou non adopter un modèle d'organisation faisant la part belle à plus de flexibilité et au télétravail ? Loin des effets de mode, la principale question porte sur les bénéfices d'un modèle hybride qui allie de façon pérenne travail au bureau et télétravail. Si la réponse varie selon le secteur d'activité et la nature des emplois, quatre forces distinguent les organisations qui font ce choix.  

Dans un contexte de compétition toujours plus élevée pour attirer les talents des jeunes générations, la période de retour « au monde d'avant » au bureau est, pour beaucoup de salariés, particulièrement propice à une remise en question et une recherche de nouveaux challenges. Abattre les frontières traditionnelles de l'entreprise présente une chance unique d'atteindre des profils éloignés géographiquement des lieux physiques de travail.

Cette flexibilité améliore sensiblement la marque employeur des entreprises qui en font le choix. Cela correspond aux nouvelles attentes des salariés : les aidants familiaux sont de plus en plus nombreux quand les générations Y et Z représenteront 50% des actifs dès 2025. Pour ces populations, gagner en autonomie et liberté d'organisation joue sur le bien-être, donc sur l'engagement.

Cette révolution en marche offre également des perspectives intéressantes en matière d'aménagement du territoire et de refonte des immeubles de bureaux. Les grandes tours jacobines de La Défense pourraient laisser la place à des hubs régionaux qui permettraient aux salariés de se retrouver entre un à trois jours par semaine en hybride sur différents sites en France, reliés entre eux par les meilleurs outils de visio-conférence qui ont prouvé leur efficacité sur les derniers mois.

Plus de collaboration à distance et moins de foncier induisent enfin une réduction de l'empreinte environnementale à une époque où la chasse au CO2 devient un enjeu majeur de société.


Le rôle fondamental des managers de proximité


Il n'existe pas aujourd'hui de méthode de référence pour mener une organisation vers l'hybride. Beaucoup de questions se posent, peu de certitudes sont établies. Nous entrons dans une phase de test propre à chaque entreprise. Les défis à relever sont nombreux : maintenir la culture, développer les savoir-faire, renforcer l'inclusion en particulier des nouvelles recrues, favoriser la collaboration et conduire l'innovation. Il faut accepter de lancer des actions, de les évaluer, parfois de se tromper et de les ajuster pour atteindre le meilleur point de chute. Nombreuses sont les entreprises qui se targuent d'être agiles... C'est le moment de le prouver !

Pour mener à bien ces actions, une vraie mutation du rôle managérial est attendue : plus proche, à l'écoute des besoins et contraintes des équipes, capable de faire travailler ensemble des personnes sur site et à distance, insufflant une communication plus horizontale, créant aussi de nouvelles routines collectives pour engager durablement les communautés. Dans un environnement de travail plus flexible, le manager de proximité constitue le lien principal entre l'entreprise et le salarié. C'est elle ou lui qui, garant de l'autonomie et de la responsabilisation des collaborateurs, pilote les résultats de chacun et se fait donc le porte-parole des attentes accrues de l'entreprise. Plus de liberté avec plus d'exigence sur les résultats. C'est dans cette actualisation du rapport droits/devoirs que se fondera le nouveau pacte social des entreprises qui sortiront gagnantes du déconfinement.


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