Immobilier : comment échapper à la hausse des taxes

Àpartir du 1er février 2012, les ventes de biens immobiliers détenus depuis moins de trente ans seront soumises à l'impôt sur les plus-values. Seule la résidence principale y échappe encore.
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Le projet de loi de finances présenté par le gouvernement le 24 août a modifié la taxation des plus-values immobilières. Après discussion parlementaire, les députés ont gardé le principe de l'abattement, que le gouvernement avait supprimé, mais ont fait passer le délai d'exonération de 15 à 30 ans, avec un nouveau barème (voir ci-contre).

Si vous détenez une maison de famille où vous ne passez plus vos vacances, ou un patrimoine locatif que vous souhaitiez céder d'ici à quelques années, faites vos calculs. « Beaucoup de propriétaires ne se rendent pas compte du montant qu'ils vont devoir payer au fisc car ils n'ont pas d'idée de la plus-value réalisée », soupire Jean Perrin, président de l'Unpi. Pourtant en dix ans, le marché de la pierre a beaucoup progressé, certaines régions affichant des hausses de plus de 100 % ! Avec une taxation de 19 %, plus 13,5 % de prélèvements sociaux, le chèque à régler au fisc va souvent représenter plusieurs dizaines de milliers d'euros.

Pour échapper à ce nouvel impôt ou en tout cas le limiter, il existe plusieurs stratégies (lire ci-dessous). La première d'entre elles consiste à vite vendre votre bien pour bénéficier de l'ancien régime d'exonération. Attention, la vente effective doit avoir été réalisée avant le 1er février 2012, c'est-à-dire que le compromis ou la promesse de vente doit être signé dans le courant du mois de novembre au plus tard. Pour échapper à la nouvelle taxe, mieux vaut tout prévoir, et notamment anticiper un éventuel décalage dû à l'acquéreur. « Le vendeur peut prévoir avec son notaire l'insertion d'une clause qui indique que l'acheteur prendra en charge l'impôt sur les plus-values s'il était responsable d'un retard dans la signature », conseille Philippe Pescayre, avocat-associé au cabinet Alérion.

Ce sera le cas si, par exemple, il n'a pas respecté les délais pour demander son crédit bancaire. Autre possibilité, si vous anticipez quelques problèmes de financement pour votre acheteur, insérez dans l'acte de vente une clause résolutoire qui met en place un paiement échelonné sur six mois. « Cela permet de signer l'acte définitif avant le 1er février 2012 et donc de bénéficier de l'ancien régime des taxations des plus-values », assure Alexia Henry, ingénieur patrimonial à la BPE.

Autre piste, uniquement valable pour les particuliers qui envisageaient la vente d'un très grand patrimoine immobilier et ne pourront pas respecter les délais du 1er février : se délocaliser dans un pays de l'Union européenne avant la cession. À condition bien sûr qu'ils aient un intérêt économique à vivre dans leur nouveau pays. « Dans ce cas, ils seront soumis au nouveau régime fiscal, mais ils ne seront imposés qu'à 19 % sur leurs plus-values et échapperont aux 13,5 % de prélèvements sociaux », constate Philippe Pescayre.

Conserver ou louer

Dernière piste : conserver le bien. Vous avez un patrimoine immobilier depuis plus de dix ans et n'envisagez pas de vous en défaire. Pour éviter de payer la nouvelle taxe, gardez-le ! Car si vous le vendez dans deux ou trois ans, la facture risque d'être salée. « Les personnes qui détiennent leur bien depuis 15 ans sont aujourd'hui exonérées en totalité sur les plus-values, mais ne bénéficieront plus que d'un abattement de 20 % à partir du 1er février 2012 », souligne Alexia Henry, ingénieur patrimonial à la BPE. Si vous êtes propriétaire d'une résidence secondaire, louez-là.

3 stratégies pour réduire l'impôt

1 - N'hésitez pas à faire des donations

Si vous disposez d'un patrimoine immobilier important, et que vous envisagez de le transmettre à vos enfants, c'est sans doute le bon moment. En effet, comme les donations sont taxées, elles sont exonérées d'impôt sur les plus-values.

Donner un bien immobilier permet donc de purger intégralement la plus-value réalisée, quelle que soit la durée de détention.

Le souci ? Parfois, le montant des droits de donation est supérieur au gain en impôt sur les plus-values, il faut donc effectuer de fastidieux calculs avant de se lancer dans l'opération.

Bon à savoir : il est possible d'effectuer une donation avec charge, « cela signifie que si le propriétaire donateur rembourse encore un crédit pour financer le bien qu'il donne, les droits de mutation seront calculés sur la valeur nette de ce bien, une fois retranché le montant du crédit restant dû », précise Christophe Chaillet, responsable de l'ingénierie patrimoniale à HSBC France.

Il faut être sûr de son fait, car les donations sont irréversibles. Impossible donc de revenir en arrière si finalement vous souhaitez retrouver votre bien.

Il existe toutefois une alternative, c'est le démembrement : « Si le logement donné est destiné à procurer des compléments de revenus, mieux vaut donner seulement la nue-propriété et conserver l'usufruit pour continuer de percevoir les loyers », précise Alexia Henry, ingénieur patrimonial à la BPE.

2 - Vendez votre bien à une SCI familiale

À condition que l'opération ait un but patrimonial, vous avez la possibilité de vendre tout ou partie de votre patrimoine immobilier à une SCI (société civile immobilière) familiale.

Le fisc est très vigilant sur ce type d'opération, et le risque de requalification est important, s'il prouve que la vente a pour unique but de contourner la nouvelle taxation sur les plus-values. « Une telle opération peut être envisagée dans le cadre d'une diversification de patrimoine, pour un particulier qui détiendrait quasi exclusivement des biens immobiliers et souhaiterait dégager des liquidités pour investir dans des placements financiers », précise Alexia Henry, ingénieur patrimonial à la BPE. Autre idée : vendre un bien immobilier à une SCI familiale dans laquelle les enfants auraient des parts, « lorsque les enfants sont associés au capital de la SCI, cela permet de démarrer une transmission du patrimoine dans les meilleures conditions », souligne Christophe Chaillet, responsable de l'ingénierie patrimoniale à HSBC France.

Pour optimiser l'opération, la SCI doit financer l'achat du bien à crédit car les intérêts d'emprunt sont déductibles des revenus fonciers. Ce type de vente est donc plutôt à privilégier pour le patrimoine immobilier locatif, car le crédit sera en partie remboursé grâce aux loyers encaissés.

Attention : en cas d'apport d'un bien par son propriétaire à une SCI familiale, la nouvelle taxation des plus-values est applicable depuis le 25 août 2011.

3 - Changez de résidence principale

Contrairement à la résidence secondaire, la vente d'une résidence principale bénéficie d'une exonération totale d'imposition sur les plus-values réalisées. Si vous partagez votre temps entre un appartement dans une grande ville et une maison de villégiature que vous envisagez de vendre, il est malin de faire de cette seconde votre résidence principale avant de la vendre.

L'opération est contraignante car, même s'il n'y a plus de délai légal minimal d'habitation du bien, les services fiscaux sont très regardants sur ce genre d'opération. « La résidence principale doit être le lieu d'habitation habituelle et effective du ménage », précise Alexia Henry, ingénieur patrimonial à la BPE. Cela signifie qu'il faut effectuer un déménagement physique, mais aussi administratif : revenus, feuilles d'imposition... devront être envoyés à votre nouvelle résidence principale et vos papiers d'identité tenir compte du changement d'adresse. La résidence principale devant être le lieu où le couple travaille et où les enfants sont scolarisés. Attention, en cas de doute, le fisc n'hésitera pas à éplucher les factures de gaz, d'électricité et de téléphone afin de vérifier la véracité du déménagement.

« La communication gouvernementale autour de la nouvelle loi a été outrageusement mensongère »

Inteview avec Jean Perrin, président de l'Unpi, pour qui la nouvelle taxation sur les plus-values immobilières risque de provoquer un blocage du marché.

La nouvelle taxation sur les plus-values vous satisfait-elle ?

Bien sûr que non ! Même si l'Etat n'a cessé de taxer les plus-values, au fil des ans, le délai d'exonération était passé de 32 ans à 15 ans. Fixer ce délai à 30 ans est donc un vrai retour en arrière, d'autant que les moins-values réalisées par certains propriétaires ne bénéficient, elles, d'aucun avantage fiscal particulier.

Quels sont les biens touchés par la nouvelle taxation ?

À partir du 1er février 2012, toutes les plus-values réalisées sur des biens qui ne sont pas des résidences principales seront imposées sous le nouveau régime. La communication gouvernementale autour de la nouvelle loi a été outrageusement mensongère, car elle a été présentée comme une simple suppression de l'abattement sur les résidences secondaires. C'est totalement faux ! L'immobilier locatif et les terrains à bâtir sont inclus dans le champ de la nouvelle mesure. Seule la résidence principale échappe à cette nouvelle taxation.

Cette mesure est censée rapporter 2,2 milliards d'euros. Quelle est votre analyse ?

Ce calcul est totalement illusoire, car la nouvelle taxation va inciter les propriétaires à retirer leur bien de la vente plutôt que de payer 32,5 % sur leurs plus-values, après des abattements minimes par année de détention. Cette mesure va donc provoquer un blocage du marché immobilier et faire baisser les recettes au niveau global, car il y aura moins de droits de mutation encaissés, car moins de ventes. Au final, elle va donc en plus mettre en péril les finances des collectivités locales qui vont devoir augmenter leurs taxes locales. Les propriétaires vont donc subir une double peine, car ils vont voir, à terme, leurs impôts fonciers augmenter.

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Commentaire 1
à écrit le 07/10/2011 à 12:55
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Dossier fort complet. Merci

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