La plateforme d’intérim coopérative Ettic professionnalise les acteurs du médico-social

Confrontée à une multiplication des contrats à durée déterminée, l’association ADAPEI Loire-Atlantique, spécialisée dans l’accompagnement des personnes handicapées mentales, a favorisé la création de la première plateforme coopérative d’intérim (ETTIC) pour les métiers du secteur médico-social des Pays de la Loire. Menée avec la start-up Team Officine, l’initiative mutualise les compétences et fait grandir la gestion des RH dans les structures associatives.
Un an après sa création, Ettic, la plateforme coopérative d'intérim du secteur médico-social réfléchit à la manière de se renforcer ou de se dupliquer.
Un an après sa création, Ettic, la plateforme coopérative d'intérim du secteur médico-social réfléchit à la manière de se renforcer ou de se dupliquer. (Crédits : Reuters)

Un peu plus d'un an après son lancement dans Pays de la Loire, la première plateforme d'intérim coopérative du secteur médico-social ETTIC vient de sortir des frontières régionales avec la signature d'un contrat avec une association du Loir-et-cher. Déjà, des associations nationales lui font du pied pour la rejoindre ou dupliquer un modèle inédit imaginé au lendemain d'une learning expédition organisée au sein de la Care Factory, à Nantes. « La particularité du secteur médico-social, c'est d'apporter un service H24, sept jours sur sept, et d'avoir un recours massif au remplacement pour des contrats allant de 2 heures à 18 mois, généralement destiné à faire face à une urgence. Or, cette accumulation de contrats n'est socialement pas idéale, loin de nos valeurs et chronophage pour les structures associatives», détaille, alors, Marc Marahdour, l'ex-directeur général de l'association Adapei44, spécialisée dans l'accompagnement des personnes déficientes mentales, (1.650 salariés permanents), à l'origine de cette démarche.

Face à cette problématique, Muriel Darniche, fondatrice de la startup nantaise Team Officine, spécialisée dans le recrutement de pharmaciens, accepte d'apporter un regard extérieur et de relever le défi. «On a mis en évidence un manque de communication, des surcoûts, des problèmes d'organisation et qu'il pouvait avoir intérêt à partager des candidats sur des postes à temps partiel », précise-t-elle, au lendemain d'une étude sur le secteur, qui va la pousser à co-créer une solution digitale ad'hoc.

Une alternative à la débrouille...

ETTIC est née de là, en juillet 2019, fondée par Team Officine, l'Adapei44 et sept autres associations (Apajh, ADT44, Apei Ouest, Linkiaa...) œuvrant dans les secteurs de l'aide à domicile, de la protection de l'enfance, des personnes handicapés... toutes confrontées aux mêmes problématiques de main d'œuvre. « Jusqu'à présent, chaque association avait son propre fonctionnement, souvent très archaïque, avec une petite liste de remplaçants connus. Généralement, on appelait régulièrement les mêmes. Mais dès qu'arrivait une épidémie de gastro un lundi matin, par exemple, c'était la galère, le classeur à CV et la débrouille... Pour les candidats, Pôle Emploi était peu opérationnel dans ce secteur. Les quelques sociétés d'intérim existantes, étaient plus centrées sur le médical que le médico-social, et surtout, ça coutait très cher aux associations», détaille Yann Largeaud, directeur exécutif de la plateforme ETTIC, dont la particularité est inscrite dans ses statuts. « Nous sommes une SIIC, une Société d'Intérim d'Intérêt Collectif à but non lucratif. Nos charges doivent être le plus faible possible pour garantir une qualité d'accompagnement et de recrutement. Le fonctionnement est calibré sur le volume d'affaires demandé par le client. A nous de mettre les moyens en face. Sachant qu'il nous faut une personne pour gérer 30 équivalents temps plein. Si bénéfices il y a, le conseil d'administration décide, soit de les redistribuer aux adhérents au prorata de leur volume d'intervention, soit de les réinvestir dans la plateforme pour la développer»

 ... pour un surcoût de 12,5%

Ce modèle social, éthique et solidaire a changé la donne. Pour les remplaçants, d'abord, qui ne sont plus salariés des associations mais de la plateforme ETTIC, qui a maintenu les conditions de salaires de chacun. « Pour eux, c'est la possibilité de pouvoir intervenir dans plusieurs de nos 150 établissements référencés », observe Yann Largeaud. Surtout, les associations ont été libérées des tâches administratives, de la rédaction des contrats et des recrutements dont ce n'est pas le métier. Cette prise en charge représenterait un surcoût de 12,5% pour les associations. Un montant impacté par le coût de la plateforme et l'embauche des chargés de recrutement d'ETTIC.

Basée à Basse-Goulaine, près de Nantes, celle-ci dispose déjà de bureaux physiques et de représentants à Laval, Angers, Le Mans de manière à pouvoir rayonner sur l'ensemble de la région. Au total, l'investissement pour la création de la plateforme, le matériel, les véhicules et les premiers recrutements aurait atteint 400.000 euros, soutenu par France Active, l'Union régionale des Scops, le groupe VYV (Harmonie Mutuelle), Nantes Métropole... et la région des Pays de la Loire, à condition que la plateforme intègre la Vendée. Ce qui ne devrait tarder.

Un an après son lancement, ETTIC emploie déjà douze personnes, a attiré une vingtaine de partenaires et aurait réalisé, pour son premier exercice (sur seize mois), un chiffre d'affaires de 10 à 11 millions d'euros, en croissance de 20 % par mois. « En octobre 2019, on réalisait 3 contrats par mois, en septembre 2020, on en a signé 2300 », se félicite Marc Marahdour. ETTIC dispose d'une cvthèque de 3000 à 4000 candidatures. « Sur les treize derniers mois, mille cinq cents personnes au moins ont eu un contrat de 2 heures à 18 mois chez l'un de nos huit coopérateurs», dit-il. Combien de CCD seront transformés en CDI ? « C'est l'une de nos ambitions mais il trop tôt pour le dire. Ça dépend aussi de la volonté des gens. Chez nous, rien n'est imposé», souligne Yann Largeaud.

Travailler sur la "marque employeur" des associations

Au-delà des placements, l'initiative vise aussi à professionnaliser les structures d'accueil dans une démarche de co-construction. « Les associations sont venues parce qu'elles ressentaient le besoin de perfectionner leurs embauches, face à une impression d'incapacité de pouvoir répondre à l'urgence dans un secteur qui recrute. Ce qu'on leur propose, c'est de pouvoir partager du personnel. D'un autre côté, on connait les établissements, on est là pour les aider à améliorer leur fonctionnement pour éviter de voir partir leurs employés. C'est arrivé deux fois -sur 150 établissements- pour le non-respect des gestes barrières ou lorsqu'un personnel permanent odieux prenait les remplaçants pour des larbins... Alors, on intervient, on les conseille. Ça leur permet de travailler leur marque employeur...», indique le directeur de la plateforme, qui entend, l'an prochain, développer un département formation pour accroitre les compétences et la polyvalence des remplaçants.

Sollicitée pour étendre son périmètre, ETTIC, qui ne représente encore que 5% du potentiel régional, réfléchit maintenant à la manière d'élargir ou de dupliquer son concept. « Se renforcer en interne ou sous forme de licence, de franchise, d'essaimage... il est trop tôt pour le dire mais la question du futur se pose», reconnaissent les fondateurs de la plateforme, dont Team Officine, qui a fait cette opportunité, une diversification pour devenir éditeur de solutions.

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Commentaire 1
à écrit le 19/12/2020 à 9:02
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C'est une bonne initiative, vu que nos dirigeants politiques et économiques sont totalement défaillants nous n'avons pas d'autre alternative que de nous gérer nous mêmes.

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