La BBC poussée à réduire son empire

Sous la pression du groupe Murdoch et des conservateurs, l'entreprise publique britannique envisage de restreindre sa présence sur Internet et de fermer des radios.

La BBC se prépare à se serrer sévèrement la ceinture afin de faire face à un prochain gouvernement conservateur. Alors que les Tories sont les grands favoris du scrutin qui se déroulera probablement début mai en Grande-Bretagne, le groupe audiovisuel public britannique va dévoiler le mois prochain des propositions pour réduire la taille de son empire : baisse d'un quart du budget de son site Internet, fermeture de deux radios, réduction de sa division commerciale...

Ces mesures, révélées vendredi par le "Times", ne sont pas encore officielles. Mais la BBC confirme qu'elle prépare une nouvelle stratégie "qui laissera beaucoup de place aux médias commerciaux", ces concurrents privés qui la jugent trop omniprésente. Il s'agira désormais de plus se concentrer sur la qualité, en cherchant moins à faire de l'audimat.

Jeu politique

Derrière cet apparent hara-kiri de la BBC se cache un jeu politique. Les conservateurs sont soutenus ouvertement par les médias de Rupert Murdoch, en particulier le tabloïd "The Sun". Or, James Murdoch, le fils du magnat, qui dirige les opérations européennes et asiatiques depuis Londres, est très virulent contre la BBC, "l'ampleur des activités [de la BBC] et de ses ambitions". La corporation concurrence en effet ses journaux - le "Times" et le "Sun" - et sa télévision par satellite, Sky, qui domine la télévision payante en Grande- Bretagne.

Idéologiquement peu favorables à la télévision publique, les conservateurs semblent se ranger aux arguments de James Murdoch. Très flous sur l'ensemble de leur programme, ils sont étonnamment précis en ce qui concerne les médias. Le dossier a été confié à Jeremy Hunt, ministre " fantôme " de la Culture, star montante du Parti conservateur. Il a affirmé l'an dernier qu'il étudierait la possibilité d'une baisse de la redevance. Il propose aussi d'abolir le BBC Trust, l'organe chargé de superviser la BBC, jugé insuffisamment indépendant. Surtout, il juge la corporation trop dominante : "Nous aurons une discussion complète et fondamentale avec la BBC sur ses activités", affirmait-il en octobre au "Financial Times".

Avec le plan de réduction du périmètre de la BBC préparé par le directeur général, Mark Thompson, la BBC espère échapper à une sanction politique trop violente. Selon le "Times", elle chercherait à réallouer presque 700 millions d'euros (sur un budget de 4 milliards) pour financer des programmes haut de gamme, que ne feraient pas les médias privés. Cela nécessite par ailleurs d'importantes économies. On cite une réduction des achats à l'étranger, notamment de séries américaines, ou la fermeture de 6 Music, radio numérique jugée trop confidentielle, ou encore le réseau de radios visant la communauté indienne. Le site Internet, extrêmement populaire, verrait aussi son budget réduit d'un quart. Il est très critiqué pour créer une concurrence gratuite avec d'autres médias dans un domaine qui sort de l'audiovisuel,

Bras de fer

La réaction du "Times"» - propriété du groupe Murdoch - laisse penser que ces propositions ne suffiront pas à calmer les ardeurs des conservateurs. Dans un éditorial assassin, le quotidien suggère plutôt " une baisse substantielle de la redevance". Un bras de fer entre la BBC et le probable prochain gouvernement s'annonce.

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