Alors que la grogne enflait ces dernières semaines, l'Assemblée nationale a joué la carte du compromis. Jeudi soir, les députés ont approuvé à l'unanimité un texte visant à concilier l'essor du numérique et la protection de l'environnement. Un point, en particulier, suscitait la polémique : l'application de la redevance copie privée (RCP) aux smartphones de seconde main. Instaurée en 1985, cette redevance s'apparente à une taxe visant tous les appareils permettant de copier des œuvres culturelles. Pendant les travaux parlementaires, des sénateurs LR ont ajouté un article qui a mis le feu aux poudres. Celui-ci visait à exclure les appareils de seconde main - essentiellement les smartphones - du périmètre de la redevance copie privée.
L'initiative a suscité un fort émoi dans le monde de la culture, inquiet de voir les recettes de cette redevance, qui se sont élevées à 273 millions d'euros l'an dernier, fondrent comme neige au soleil avec la montée en puissance du marché du reconditionné. Cette manne est essentielle à leurs yeux. Et les artistes, manifestations culturelles et festivals en ont plus que jamais besoin, alors que le secteur a particulièrement souffert de la crise sanitaire. Roselyne Bachelot, la ministre de la Culture, a ainsi jugé « inconcevable » toute remise en cause de la RCP.
Une solution « gagnant-gagnant » pour Bachelot
En face, les acteurs des smartphones reconditionnés - et le premier d'entre eux, Back Market - ont tapé du poing sur la table. Dimanche dernier, dans une tribune parue dans le JDD, ils ont estimé qu'une taxation des appareils de seconde main, qui représentent 15% du marché) minerait la profession. Elle pourrait déboucher, alertent-ils, sur la perte de la moitié de ses 5.000 emplois. Ces acteurs bénéficiaient, en outre, du soutien des ministères de l'Ecologie et du Numérique, qui voient dans le marché de l'occasion un moyen de réduire significativement l'empreinte carbone du numérique.
Jeudi soir, les députés ont donc décidé de couper la poire en deux. Leur compromis prévoit que les téléphones d'occasion seront bien soumis à la RCP. Mais ils bénéficieront d'un taux « spécifique et différencié ». Celui-ci tiendra compte de l'ancienneté des produits. En parallèle, les entreprises du secteur social et solidaire en seront exemptées. Les amendements déposés en ce sens par le gouvernement et les députés de la majorité ont tous été adoptés lors de l'examen de la proposition de loi. De quoi satisfaire Roselyne Bachelot, qui a jugé que cette « solution » était « gagnant-gagnant » pour les artistes et le secteur du reconditionné.
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