Truth Social, l'outil de propagande de Donald Trump face aux graves accusations du FBI

Par François Manens  |   |  899  mots
(Crédits : BRIAN SNYDER)
Accusé d'avoir ramené dans sa villa floridienne des documents top secret, Donald Trump organise sa défense sur Truth Social, le réseau social créé par une de ses sociétés. En plus de profiter d'une absence de modération, il y retrouve ses plus fervents supporters, dont certains prêts à le défendre violemment.

Ce week-end, Donald Trump a publié plus d'une douzaine de messages sur Truth Social, son propre réseau social, sur lequel il était resté étonnamment discret jusqu'ici. Et pour cause : l'ancien président recherche frénétiquement une ligne de défense contre une enquête menée par le FBI. Le 8 août, l'agence fédérale menait une perquisition à sa célèbre villa de Mar-a-Lago, en Floride. Un document de justice rendu public vendredi liste le matériel confisqué, dont 11 séries de documents classifiés, pour certains estampillés top secret et censés être conservés dans des infrastructures dédiées. L'un d'entre eux était d'ailleurs relatif à la présidence française.

Donald Trump aurait ramené ces documents chez lui à son départ de la Maison Blanche et ainsi violé trois lois, dont l'Espionage Act. Il risque plusieurs années de prison ferme.

Trump organise sa défense sans modération

Suite à la perquisition, Trump a organisé sa défense... de façon très confuse, comme le détaille Business Insider. Dans un premier temps, il a suggéré sans aucune preuve que le FBI aurait pu déposer lui-même les documents afin de le piéger. Puis il a accusé son prédécesseur, Barack Obama, d'avoir aussi ramené des documents classifiés chez lui, toujours sans preuve, arguant que "tout le monde ramène du travail à la maison de temps en temps." Avant de finalement exiger que le FBI lui ramène les documents saisis, alors qu'il affirmait que ce même FBI les avait placés chez lui....

En plus de ses propres messages, l'ancien président relaie également des "Truth" de ses plus fervents supporters, parfois violents envers le FBI. Ces derniers font notamment référence à QAnon, une mouvance conspirationniste d'extrême droit très influente, au point d'être représentée au parlement américain par la voix de la députée Républicaine Marjorie Taylor Greene, entre autres.

D'après le Washington Post, Trump verrait dans la perquisition un point de ralliement pour les Républicains, mais les figures du parti sont pour l'instant silencieux sur le sujet. En revanche, ses plus fervents supporters boivent ses paroles, et certains réagissent violemment. Symbole de cette mouvance, lundi, après la perquisition, un homme du nom de Ricky Shiffer a appelé à tirer à vue sur les agents fédéraux dans un message publié sur Truth Social -depuis supprimé par le réseau, comme le rapporte 20 Minutes. Il a ensuite tenté de s'introduire sans succès dans le bureau du FBI à Cincinnati. Confronté par les forces de l'ordre jeudi après avoir revendiqué son attaque, il a finalement été tué à la suite d'une course poursuite et d'échanges de tirs.

Cet épisode rappelle forcément l'invasion du Capitole par les soutiens de Trump, le 6 janvier 2021. Le discours de l'ancien président, publié désormais sans filtre sur Truth Social et amplifié par tout un réseau de l'ultra droite américaine, a encore le pouvoir de mobiliser des individus violents.

Truth Social enfin utilisé ?

Cette soudaine mobilisation de Truth Social par Donald Trump arrive après des mois d'utilisation erratique. Absent du haut des classements de téléchargement de l'App Store pendant des mois, Truth Social n'y avait fait qu'un bref passage en avril, lorsque Elon Musk a présenté son offre d'achat pour Twitter. Le milliardaire avait précisé qu'il était ouvert au retour de l'ancien président sur le réseau social, mais cette offre a rapidement été déclinée par le principal concerné, ajoutant qu'il trouvait le réseau "ennuyeux". Pourtant, Trump s'était servi de son compte Twitter à plus de 88 millions d'abonnés comme principal outil de communication tout au long de son mandat et auparavant, n'hésitant pas à publier plus d'une dizaine de messages par jour.

Mais lorsqu'il a été exclu de la plateforme (et de Facebook) après plusieurs mises en garde pour ses propos sur l'invasion du Capitole, il avait annoncé qu'il ne s'exprimerait plus que sur Truth Social, son propre réseau, boudant même les autres réseaux peuplé de ses supporters comme Parler et Gettr. D'où le regain d'intérêt pour l'app fin avril. Malgré cette position publique, l'ex-président est longtemps resté muet sur le réseau avec un seul message entre son lancement fin février et la fin avril.

Cette absence, mêlé de nombreux bugs et une étrange stratégie d'admission a mené à un démarrage poussif. Plus globalement, Truth Social est pour l'instant condamné à rester confidentiel. Accessible uniquement aux Etats-Unis, l'application n'est disponible que sur l'App Store, c'est-à-dire sur iPhone, Mac et iPad. Autrement dit, seuls 47% des propriétaires d'iPhone américains ont accès au réseau. Résultat, Truth Social n'aurait qu'un peu moins de deux millions d'utilisateurs, mais il semblerait que tous y partagent les mêmes idées de l'extrême droite américaine, sans aucune véritable modération.